93 Days of Summer : Christopher

Le 21 juin annonce le début de l’été,  l’amorce  de son rythme si caractéristique. Là, les compteurs repartent souvent à zéro, les projets prennent une pause ou, au contraire, un nouvel élan d’énergie accélère les choses. Plus loin des contraintes, pendant 93 jours, l’été ouvre son champs des possibles. 

Sur cette période, @le_s2t, s’est donné la mission d’interroger 13 jeunes créatifs, sur leur passion, leur avenir et leur projet cet été.

Il est 15h quand nous traversons un Viry-Châtillon triste et peinant à se réveiller, alors que Christopher, au contraire de sa ville, entame sa journée après avoir quitté le studio au petit matin. Travaillant avec des artistes comme Aya Nakamura, Naza, Keblack, Benash et bien d’autres, le jeune compositeur/réalisateur artistique raconte son histoire et sa musique en toute humilité.

T’as grandi où ? 

J’ai grandi dans le 91 à Viry-Châtillon, à la cité dans une tour de 12 étages avec une vue sur tout le quartier. On passait notre temps à jouer au foot et à écouter de la musique. J’ai grandi comme ça, avec une bonne éducation de mes parents et le quartier pour me forger. On a vécu des moments très durs, comme le décès de mon grand frère quand j’avais 13 ans et comme tu peux te l’imaginer ça m’a fait grandir très vite.

Est-ce que ça a influencé ta musique ?

Mon grand frère faisait un peu de musique de son côté, et ça m’a sûrement influencé. Je suis tombé dedans un an avant sa mort et ça a peut-être mis un blues dans ma musique. Au début on se débrouillait avec rien, il n’y avait pas de tutos sur internet donc j’ai appris tout seul. Pendant 3 ou 4 ans j’ai galéré comme ça jusqu’à ce qu’un grand à moi, Alois Zandry,  un de mes mentors au même titre que Julien Sankovich ou Kimi Maro, m’a appris comment faire un hit et comment faire sonner un son.

Quelles sont tes inspirations ?

La période qui m’a énormément inspiré, c’est l’époque où Miami rayonnait sur le monde avec The Runners, Cool and Dre, Scott Storch, Triple C’s, Rick Ross ou même les débuts de Dj Khaled… c’est une période qui m’a beaucoup touché.

 


“L’inspiration ne s’arrête jamais, la musique c’est gros comme l’univers, c’est une infinité et on est toujours à la recherche de la perfection.”


 

Comment fonctionne ta créativité?

Je ne pourrais pas te dire que ça vient le soir et que j’ai besoin de fumer ou de boire, ça vient comme ça. En fait, c’est mon travail d’être créatif et que ce soit un projet sur commande ou personnel, j’essaye d’apporter ma touche, d’imprimer ma patte. Par exemple, la Débauche de Naza, c’est un sébène en fait, c’est un genre artistique qui vient de chez moi, du Congo, et maintenant c’est dans le top 10 des clubs en France alors qu’à la base c’est un son de blédard ahah! Mais avec Naza c’est urbain, c’est festif et puis l’afro c’est dans l’air du temps.

Et toi tu fais uniquement de l’afro ? Quelle est la musique que tu aimes faire ?

J’aime faire du son au sens général, que ce soit de l’afro, du hip-hop ou de l’électro. J’ai fait le conservatoire, je suis guitariste de formation, pianiste autodidacte et maintenant je joue plus de piano que de guitare, comme sur Premier Étage de Keblack. C’est un titre qui a de la poigne et j’ai pris beaucoup de plaisir à le réaliser. Et puis le mec il vient de l’urbain et il assume un gros piano voix, ça montre qu’il n’y a plus de codes.

Aya, Naza, Keblack ou Benash, qu’est ce que tu apprends de toutes ces collaborations avec ces gros artistes ?

Au moment où j’ai travaillé avec eux, c’était encore des artistes en développement et à chaque fois qu’on a bossé ensemble, la musique venait du coeur. On n’a pas fait de hits ensemble dès le début mais on était dans une démarche de développement artistique et je suis content de voir ce qu’ils ont accompli. Mais ce n’est pas une fin en soi, l’inspiration ne s’arrête jamais, la musique c’est gros comme l’univers, c’est une infinité et on est toujours à la recherche de la perfection.

 


“C’est mon travail d’être créatif et j’essaye toujours d’apporter ma touche, d’imprimer ma patte. Par exemple, la Débauche de Naza, c’est un sébène en fait, c’est un genre artistique qui vient de chez moi, du Congo, et maintenant c’est dans le top 10 des clubs en France alors qu’à la base c’est un son de blédard!”


 

Comment est-ce que tu as fait pour en arriver là justement?

Le chemin n’a pas été facile, la vie d’artiste c’est compliqué, il faut faire des sacrifices, qu’ils soient financiers ou personnels. D’ailleurs ce que je fais aujourd’hui c’est un travail de fond, de longue haleine, ce n’est pas du tout motivé par l’argent. J’ai envie de mettre en valeur le travail de compositeur et de réalisateur artistique, qui est un métier de second plan mais sans ce genre de personne, il n’y aurait pas de musique et c’est important que les gens le sachent.

Moi j’avais l’image de l’artiste qui reçoit une production et qui pose dessus tout simplement…

Ben t’as des gars comme Jul qui sont limite en 360 mais certains ont besoin d’être accompagnés. Par exemple avec Aya Nakamura, on va partager nos idées et c’est important que je sois en studio avec elle pour échanger en terme de direction artistique, de compo ou de topline. Un artiste peut éprouver des difficultés à retranscrire ses idées dans sa musique et c’est là que mon rôle de réalisateur artistique est important. Mon but ce n’est pas de dénaturer un artiste mais au contraire de l’aider à faire la musique qui lui ressemble.

Tu as évoqué tes origines africaines, qu’est ce que l’Afrique représente pour toi ?

Mes parents viennent du Congo et mon père écoutait beaucoup de rumba africaine assez ancienne comme Tabu Ley Rochereau, le père de Youssoupha, ou du Franco & TP O.K Jazz, qui est une génération plus ancienne que celle qu’on connaît avec les Koffi, etc… Ma mère est très pratiquante donc il y avait aussi beaucoup de musiques religieuses chez moi, beaucoup de gospel. Et puis si tu retraces les origines de la musique, une grande partie a des racines venant d’Afrique, que ce soit le blues, le negro spiritual…

 


“J’ai envie de mettre en valeur le travail de compositeur et de réalisateur artistique, qui est un métier de second plan mais sans ce genre de personne, il n’y aurait pas de musique et c’est important que les gens le sachent.”


 

D’ailleurs, on parlait de ce mélange avec Pepper dans le 2ème volet de 93dos et on trouvait ça naturel, avec justement cette jeunesse d’origine africaine qui a baigné dans cette culture américaine… 

Mais en soi le mélange est incroyable. La trap musique c’est la cité, un truc de voyou, avec des flows saccadés, mis sur des rythmes afros, uptempos et quand c’est bien fait c’est un truc de ouf. Que ce soit MHD, Niska ou d’autres, ça dépasse les frontières. Tout le monde s’y retrouve, ça rassemble, c’est intergénérationnel et je suis content de vivre cette époque de l’intérieur.

Quels sont tes prochains projets?

Il y a la sortie de Journal Intime le 25 août, l’album d’Aya Nakamura sur lequel je me suis occupé de la réalisation artistique. C’est un beau projet sur lequel on a mis du coeur et qu’on a terminé malgré les difficultés. Je suis fier d’Aya car c’est une battante et malgré les passages à vide, elle a su garder le cap.

Dernière question, t’as quel âge?

Je vais avoir 25 ans en septembre. Il va falloir être pragmatique, parce qu’à partir de maintenant chaque choix va compter.

Instagram : @christopherghenda

 

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