Chronique d’album : Big Sean – Dark Sky Paradise
Les américains sont une race à part, certainement confectionnés dans d’obscurs éprouvettes par un professeur fou. Ils sont plus grands, plus gros, plus riches, ils rappent mieux, leurs meufs sont plus bonnes et ils peuvent aller chez Shake Shack et Five Guys quand bon leur semble. Mais Big Sean reste proche de nous avec son physique bio sans tattoo et sa taille modeste. Un peu à l’écart du troupeau donc, mais bien au coeur de la machine: signé chez le label de Kanye G.O.O.D. Music et en management chez Roc nation (Jay Z). Cet album est sans doute un tournant de sa carrière et les graviers l’attendent sournoisement en sortie de virage. Pas d’inquiétude cependant, son Dark Sky Paradise est parfaitement paramétré pour les clubs, les coeurs et les cerveaux.
Le titre de l’album (Dark Sky Paradise) annonce la couleur, ou plutôt l’absence de couleur. La symbolique est déclinée tout au long de l’opus, Sean nous y explique en long, large et travers qu’il vient d’en bas, qu’il a bossé « 8 days a week » pour y arriver, que ça n’a pas été sans difficultés et qu’il se sent béni d’être maintenant au top à pop champagne avec son crew. Le rêve américain c’est lui, même s’il est traversé par des doutes légitimes et que ses plus vieux amis ne comprennent pas qu’il soit trop busy.
Au-delà de ce fil rouge, le ficelage artistique est habile. La production est confiée aux pontes du moment (le dijonnais DJ Mustard, l’étincellant Mike Will Made It, l’assoce de toujours Key Wane, le drakophile Boi-1da et le TDEiste DJ Dahi, entre autres). C’est sombre dans l’ensemble mais bien léché (« All Your Fault », « Stay Down », « I Know », « Deep ») et bien rythmé (« Blessings », « I Don’t Fuck With You », « Paradise », « Outro »). Big Sean sort, quant à lui, son « A game » en terme de performance vocale, au commande d’une mitraillette sur le grandiloquent « Paradise » et langoureusement virtuose sur « I Know ». Les invités de renom se bousculent dans la cabine d’enregistrement (Kanye, Lil Wayne, Jhené Aiko, Drake, PARTYNEXTDOOR, Chris Brown et Ty Dolla $ign) mais c’est bien Sean qui reste la star de son propre produit, et c’est une preuve de la réussite du disque.
Au final c’est vraisemblablement le projet le plus accompli du Gros Sean avec un bel équilibre entre la déballe de skillz et les sujets plus profonds. Une mention spéciale pour « Win Some, Lose Some « (moelleux à souhait), « Paradise » qui donne envie de tout casser chez soi et l' »Outro » produite par DJ Dahi dans une veine à la Kanye époque College Dropout.