Def Jam, 30 ans d’Histoire(s) | Partie V (2004-2008)

En 1984, il était assurément difficile de s’imaginer que la rencontre entre Rick Rubin, étudiant en art et amateur de métal, et Russell Simmons, frère et manager de Run-DMC, serait l’épicentre d’un séisme dans le mouvement hip-hop, et plus largement dans l’industrie du disque. 30 ans plus tard, il suffit de prononcer le nom de Def Jam pour évoquer instantanément mille et unes images et moments forts de la culture urbaine.

Par sa longévité, ses disques phares ou ses positions marketing, la maison de disques aura en effet su s’imposer comme une véritable référence dans son domaine, traversant les années et les générations sans prendre la moindre ride. Pour honorer le trentenaire d’un tel monument, nous avons souhaité retracer sa longue histoire à travers 30 anecdotes, parfois tristes, souvent drôles mais avant tout symboliques de la volonté du label de sans cesse côtoyer les sommets.

Cette semaine, retour sur les années 2004 à 2008 pour ce cinquième volet d’une saga en six parties.

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2004 : J’aurais voulu être un artiste

Avant d’être perçu comme le génie artistique dépeint aujourd’hui dans la plupart des médias spécialisés, Kanye West a longtemps été sujet à de nombreux débats au sein de l’équipe Roc-A-Fella/Def Jam. Là où Yeezy bouillonne déjà à l’idée de devenir la prochaine star du rap de Def Jam, le label ne voit en lui qu’un simple producteur. Un domaine dans lequel il avait déjà fait ses preuves, étant notamment à créditer du hit de Jay-Z « Izzo (H.O.V.A) ». Sceptiques sur les qualités de rappeur de Kanye, le trio à la tête de Roc-A-Fella finit par donner sa chance au jeune chicagoan, qui leur rend de la plus belle des manières : son premier album, The College Dropout, reçoit 10 nominations aux Grammy Awards l’année suivante.

Kanye-West-Young

2005: Two ways out

Tout juste intronisé président du prestigieux label après le rachat définitif de Roc-A-Fella par celui-ci, Jay-Z se retrouve rapidement face à ses nouvelles responsabilités, devant assurer l’avenir d’un monstre de l’industrie pérenne depuis plus de 20 ans. Cela passe naturellement par la recherche et le développement de nouveaux talents, ce qui amène donc Jigga à se pencher sur les multiples démos reçues quotidiennement par le label. L’une d’elles retiendra tout particulièrement son attention. Celle d’une adolescente caribéenne, alors âgée d’à peine 17 ans répondant au doux nom de Robyn Rihanna Fenty. Sous le charme de la chanteuse barbadienne, il l’invitera jusqu’à New York pour lui faire passer des auditions durant lesquelles elle interprète 3 titres, parmi lesquels sont futur hit « Pon De Replay ». Il n’en faut pas plus pour que Hova scelle à double tour la porte de son bureau, refusant de laisser partir la jeune artiste : « Il y a deux moyens de sortir d’ici, soit par la porte après avoir signé ce contrat, soit par la fenêtre, et nous sommes au 29ème étage ».

Rihanna

2006 : 99 problems but a beef ain’t one.

Si les clashs font partie intégrante du rap, la lutte qui oppose au début des années 2000 les légendes new-yorkaises Nas et Jay-Z est l’une des plus emblématiques de l’histoire du genre. Fruit des aspirations de chacun des deux emcees au trône de NYC laissé vacant après le décès de Biggie, cette joute a poussé pendant 4 années les deux artistes à dépasser leurs limites artistiques, donnant naissance aux classiques que peuvent être « Takeover » ou « Ether ». Les relations tendues qu’entretiennent les deux hommes s’atténuent toutefois lorsque Nas apparaît à la surprise générale sur la scène du Madison Square Garden lors du concert de Jay-Z au nom pourtant équivoque, « I Declare War ». Un premier pas considérable qui aboutit finalement sur la signature de Nas chez un Def Jam présidé par son rival historique. La hache de guerre est alors définitivement enterrée.

Nas-and-JayZ-DefJam

2007 : Buy My Album

Un peu moins d’une décennie après la signature de Method Man, c’est une autre illustre figure du Wu-Tang Clan qui paraphe un contrat avec le label, Ghostface Killah. En effet, reprochant à Epic Records l’échec commercial de son album Bulletproof Wallets, Ghost s’imagine rencontrer chez Def Jam un succès similaire à celui de son compère. Hélas pour lui, le temps lui donnera tort, et ses premiers opus sortis sous la bannière de la fameuse maison de disques affichent des résultats de vente allant de « corrects » à « laborieux », en dépit de critiques pour le moins honorables. Une situation qui sera relativement mal vécue par Ghostface Killah, qui ira jusqu’à poster en 2007 sur son MySpace officiel une vidéo reprochant à ses fans de ne pas avoir suffisamment soutenu son album The Big Doe Rehab, privilégiant le téléchargement illégal à l’achat.

Ghostface-Killah-The-Big-Doe-Rehab

2008 : Mariah Carey Day

À force de façonner de toutes pièces des artistes inconnus du public en véritables rock stars, Def Jam a logiquement obtenu la crédibilité et la puissance nécessaire pour se permettre de signer des artistes ayant une forte notoriété. Ainsi, en parallèle de la signature du monument du rap Nas, c’est la grande Mariah Carey qui intègre le catalogue du groupe. Et c’est sous l’égide de Def Jam qu’elle s’inscrit un peu plus dans la légende, en signant en 2008 avec « Touch My Body » son 18ème single en tête des ventes, dépassant ainsi le record historique d’Elvis Presley. Une performance qui a visiblement mis en émoi Antonio Villaraigosa, alors maire de Los Angeles, qui proclame que le 15 avril (date de sortie de l’album E=MC2) serait dorénavant le « Mariah Carey Day ».

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