Hommage à l’homme blanc sur cette photo (1968)

Cliché mythique dans l’histoire de la lutte pour les droits civiques, chacun se souvient de cette image capturée sur le podium du 200m des Jeux Olympiques de Mexico. John Carlos et Tommie Smith sont alors les hommes les plus rapides du monde. Et loin de jouir pleinement de leur gloire d’athlète, ils montent pieds nus les marches jusqu’à leur consécration et, un point ganté levé vers le ciel, rejettent toute leur lumière sur la cause qu’ils estiment juste, protestant contre les morts de Martin Luther King Jr. et du président Kennedy tout en rendant hommage aux Black Panthers. De cet instant, il reste un monument, érigé à l’université de San José. Mais un détail a changé. À la deuxième position, manque un personnage que l’histoire semble avoir oublié. « L’homme blanc sur la photo » dont le journaliste italien Riccardo Gazzaniga a choisi de retracer l’histoire. Une histoire qui se révèle tout aussi importante et  héroïque que celles des deux athlètes afro-américains.

 

san jose university

 

Son nom : Peter Norman. Cet Australien, né en 1942, grandi dans un pays soumis à un apartheid similaire à celui appliqué en Afrique du Sud. Sa passion pour la course le conduira à l’âge de 26 ans à ses premiers Jeux Olympiques. Véritable outsider, il surprend au fil des épreuves, effectuant à chaque courses ses meilleurs temps. On l’estime alors bien chanceux d’arriver à la dernière étape de la compétition et de courir cette course le 16 octobre 1968. Mais c’est une véritable performance qu’il effectue. Avec un temps de 20.22, il décroche le record d’Australie et le détient encore aujourd’hui. Mais c’était sans compter Tommie « The Jet » Smith qui s’empare quant à lui du record du monde avec un temps de 20.14 et qui s’apprête à recevoir la médaille d’or, aux côté de son compatriote John Carlos qui obtient le bronze.

Au moment de monter sur le podium, un bruit court dans la délégation. Quelque chose d’important se prépare. Quelques minutes avant de monter sur les marches, Norman part à la rencontre de Carlos et Smith pour en savoir plus. Mais avant tout, les deux américains lui demandent : « Est-ce que tu crois au droit de l’homme ? » Il leur répondra oui. « Est-ce que tu crois en Dieu ?« . Oui, dit-il une nouvelle fois. L’athlète tient à faire sa part dans un geste qui ne dit pas encore son nom.

« Nous savons que ce que nous allions faire était bien plus grand que n’importe quelle performance d’athlètes et il a dit : « Je vous supporterais« . Je m’attendais à voir de la peur dans le yeux de Norman, au lieu de ça, j’ai vu de l’amour. » raconte John Carlos.

Dans les coulisses le duo américains s’affaire. Ils décident d’entrer en scène avec le badge du Projet Olympique pour les Droits Humains et des gants noirs en hommage aux Black Panthers. Ne trouvant qu’une paire de gant, c’est Peter qui suggèrera au compère de les partager avant d’ajouter : « Je crois en ce quoi vous croyez. Vous avez un autre badge pour moi ? Comme ça je pourrais montrer mon soutien à la cause. » Smith, circonspect se souvient avoir marmonné « C’est qui ce Blanc australien? Il a gagné sa médaille d’argent, il ne peut pas la prendre, et c’est tout ? » Dans l’agitation, c’est un autre Américain, le rameur blanc Paul Hoffman, qui entendant parler de la requête de Norman, lui offrira son propre badge. Le reste est finalement entré dans l’Histoire. Trois hommes victorieux portant sur eux le symbole de leur soutien aux droits de tous les Hommes immortalisés et portés à la postérité.

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Pour leur geste John Carlos et Tommie Smith seront immédiatement renvoyés du village Olympique et de leur délégation. Devenus symboles de leur mouvement, ils font face à la violence de leurs détracteurs au sein d’un groupe. Quand à Peter Norman rentré seul en Australie, c’est seul qu’il fait face. Il perd l’appui du comité Olympique et malgré de très bons temps, il ne sera pas retenu pour le JO de Munich en 1972.
Pour être réhabilité, il lui aurait suffi de désapprouver le geste de ses camarades. Ce qu’il n’a jamais fait. Il deviendra finalement professeur de sport. Mais, il trouvera malgré tout une certaine reconnaissance auprès des Américains qui l’inviteront en 2000 pendant les JO de Sydney à les rejoindre pour célébrer l’anniversaire du sprinter Michael Johnson. Puis Peter Norman sera également présent pour l’inauguration de la statue de San José. Si sa place est restée vacante, ce sera pour laisser les passants la prendre eux-mêmes. Pour lui, son absence n’est pas un oubli, mais une occasion pour tous de prendre position comme il l’a fait quelques dizaines d’années plus tôt.

En 2006, il perd la vie des suites d’une crise cardiaque, Carlos et Smith restés ses amis, porteront son cercueil. Plus tard, il sera réhabilité par le Congrès Australien reconnaissant enfin son statut. Dans une motion, il adresse à titre posthume leurs excuses aux sprinter.

Le Congrès reconnaît les accomplissement athlétiques extraordinaires du défunt Peter Norman, qui remporta la médaille d’argent dans le sprint de 200m lors des Jeux Olympiques de Mexico en 1968 avec un temps de 20.06 secondes, qui reste aujourd’hui un record australien.

Nous reconnaissons la bravoure de Peter Norman dans le fait de porter le badge du Projet Olympique pour les Droits de l’Homme sur le podium, en solidarité avec les athlètes Afro-Américains Tommie Smith et John Carlos, qui ont effectué le salut du « Black Power ».

Toutes nos excuses vont vers Peter Norman pour le mal fait par l’Australie qui ne l’a pas envoyé aux Jeux de Munich en 1972, malgré qu’il se soit plusieurs fois qualifiés ; nous reconnaissons tardivement le rôle puissant joué par Peter Norman dans l’avancement de l’égalité des races

peter norman enterrement

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