Bishop Nehru : « C’est ma mère qui m’a le plus soutenu, elle a payé presque tout mon studio »

Bishop Nehru, Markell Scott de son vrai nom, est l’archétype du talent précoce.  À 14 ans, il se prend de passion pour la musique et finit par sortir, sous le nom de Keiz Scott, une mixtape instrumentale entre hip-hop et jazz.  En 2012, le New-Yorkais a 16 ans et sort le projet Nehruvia, une sonorité old school qui fait revivre les 90’s, pour lequel il est au four et au moulin, des productions aux textes en passant par les clips. Une mixtape encensée par la critique qui l’élève au rang d’artiste à suivre. Depuis, il attire des noms tels que Disclosure, le Wu-Tang Clan, Kendrick Lamar et bien sûr  Nas. Ce dernier le compte parmi les premières signatures de son label Mass Appeal, aux côtés de Boldy James et Fashawn.

Mais 2014 restera pour lui une année riche et prolifique. En juin, il sort l’EP Brilliant Youth en duo avec un autre jeune talent Dizzy Wright et en collaboration avec la marque LRG Clothing. Cependant, son plus bel accomplissement est la sortie de son premier album en duo avec le légendaire MF Doom. NehruvianDoom, une ode au hip-hop où le rapport mentor-élève entretenu par les deux protagonistes témoigne du glissement générationnel entre rappeurs confirmés et jeunes premiers toujours dans l’attente d’un succès fulgurant. Puis, il y a quelques semaines, Nas annonce qu’il sera le producteur du premier album solo de son protégé mais avant ça, Bishop Nehru nous raconte la genèse de sa vocation jusqu’à son premier album.

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Que signifie ton nom de scène ?

Bishop (l’évêque ndlr) est un guide spirituel. C’est aussi le nom du personnage de Tupac dans Juice, un film sorti dans les années 90. Et Nehru est le tout premier Premier Ministre indien, c’était un proche de Gandhi qui croyait en beaucoup de choses que je trouve cools. Je m’intéresse beaucoup à toutes ces choses : la méditation, le subconscient… comme Gandhi. Je me suis dit que reprendre le nom de Nehru était une bonne façon d’intégrer tout ça.

Tu fais de la musique depuis que tu es très jeune. Comment as-tu commencé ?

J’ai commencé à faire de la musique au collège, je devais avoir 14 ans. J’ai commencé par travailler sur l’installation d’un studio chez moi et aujourd’hui, j’ai réussi à en faire ce que je voulais. J’ai encore envie d’ajouter des choses, mais maintenant c’est faisable financièrement.

Tu te souviens de ton premier morceau ?

Je crois que j’ai d’abord rappé sur un beat de Raekwon. En fait je m’en souviens encore par coeur (il commence à rapper son premier couplet en direct ndlr), je l’avais posté sur Facebook mais je ne l’ai jamais mis sur une mixtape. La jaquette que j’ai utilisé, c’était moi avec un mohawk et une veste en cuir noire, je ressemblais à une rockstar. C’est ce que je veux encore devenir. C’était « dope », il faut que je retrouve ça.

De la production à la vidéo, tu as toujours tout fait seul. Comment est-ce que tu appréhendes les deux sphères?

Quand je fais un morceau, je pense déjà à la vidéo. Je sais ce que je veux faire, je l’ai déjà en tête. Mais la musique ne vient pas toujours en premier, je ne pense pas qu’un artiste doit avoir une véritable formule pour exprimer sa façon de faire. Je pense que c’est naturel, ça dépend de ce que tu produis. Parfois, tu peux penser à un visuel et te dire : « Comment est-ce que je peux faire une chanson un titre autour de ce visuel. » Donc ça varie.

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Qui a été ton plus grand soutien ?

Ma mère. Elle a payé pour à peu près tout mon studio. J’ai dû la supplier pendant un petit moment, parce qu’elle ne voulait pas gaspiller de l’argent, tu vois ce que je veux dire. Elle pensait que c’était encore une nouvelle phase. J’avais commencé le karaté et c’est devenu chiant, alors j’ai abandonné. J’ai fait du basket et j’ai du arrêter. Elle ne voulait pas dépenser d’argent là-dedans, alors j’ai fait des économies avec les sous qu’elle me donnait au déjeuner. J’en avais juste assez pour m’acheter un micro USB. Mais ma mère m’a forcé à retourner au basket et elle a donné mon micro à des gamins, j’ai vu qu’il l’avait gardé. J’ai continué à tout faire pour avoir mon propre studio et elle a compris que c’était plus qu’une phase quand j’ai commencé à vendre mes propres affaires pour investir dans des enceintes, un nouveau clavier…

Quelle place occupe la musique dans ta famille ?

Mon oncle jouait de la guitare. Mais ma famille était plutôt active au sein de l’église, dans la chorale, des choses comme ça.
Tout le membres de ma famille écoutent des choses différentes : l’un de mes oncles est plutôt AC/DC, Jimi Hendrix, rock, métal des trucs comme ça ; ma grand-mère écoute Al Green et Luther Vandross, plus de la musique soul ; ma mère adore neo-soul, le r’n’b ; mes cousins sont très hip-hop.

Quelle a été ta rencontre la plus importante dans l’industrie musicale ? Quels conseils as-tu reçu ?

Je ne sais pas Nas, Doom… Ils ne m’ont pas vraiment donné de conseils, Nas m’a juste dit de continuer d’être et d’irradier tu vois : « Tu peux faire tout ce que tu veux, donc fais-le.  »

Tu as sorti un album avec MF Doom. Qu’est-ce que cela signifie pour toi ?

Ça représentait tout pour moi, il est l’une de mes inspirations et c’était génial de pouvoir travailler avec lui. Je l’ai rencontré sur un show, je faisais sa première partie à Londres au 100 Club. On s’est rencontrés et ça s’est fait à peu près tout seul.

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Comment avez-vous travaillé tous les deux ?

Je ne sais pas on l’a simplement fait (rires ndlr)

Quel est le message de l’album ?

En quelque sorte, il s’agit d’aider à élargir la prise de conscience de l’univers. Ouais, c’est à peu près ça.

Quels seront tes prochains projets ?

Je ne veux pas encore donner de garantie, mais ce sera un projet solo. Mon premier projet, mon premier album solo ; seulement moi, mon son que je vais produire. C’est vers ça que je me dirige.

Tu as déjà commencé ?

Je fais toujours de la musique donc…

Tu sais déjà quelle direction tu vas prendre ?

Oui, j’ai déjà un concept. Je l’ai gardé pour mon premier véritable album. Je suis prêt, je suis au-dessus,  je suis en dehors de mon corps, de l’univers, je sais déjà ce qu’il va arriver.

Comment tu vois le futur ?

J’attends seulement, je reste patient. Mais je ne sais pas. Je pense que je perçois ce qui m’attends, mais on ne sais jamais vraiment ce qui va arriver. Je sais ce que je vois, je l’ai imaginé il y a un moment et c’est déjà arrivé. Alors, je ne pense pas que ça va s’arrêter maintenant.

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