En ride à Paris avec Roy Woods
Lors de son escale dans la ville des Lumières, l’artiste canadien signé sur le label OVO de Drake s’est plugué avec notre guide attitré. Aux prémices d’un été s’annonçant particulièrement chargé, Denzel Spencer plus connu sous le nom de Roy Woods s’est donc laissé entraîner dans la capitale afin de (re)découvrir un Paris à mi-chemin entre authenticité et clichés.
Photos : @pabloattal
C’est un Paris que trop peu d’artistes prennent le temps de visiter. En cause, un planning promo surchargé ou un manque d’intérêt évident pour l’Autre et ce désir d’échanger sur une culture si différente mais en même temps si similaire. Roy Woods est sans doute une des exceptions qui confirme la règle, peut-être parce que Brampton, la ville qui l’a vu naitre à quelques encablures de Toronto, est – à l’instar de sa grande cousine – un formidable modèle de melting-pot. La population y est principalement issue d’Asie du Sud même si différentes communautés cohabitent, faisant de la ville un formidable carrefour culturel. Ce qui influence de fait le jeune artiste qui, dans « Monday to Monday », rappe : « Gyal dem go shopping/Yorkdale with squaddy (okay)/Saks fifth better spend a bag if you walk in/Ass look melodic, in Toronto with exotic/Like these bitches are from Europe ». #CQFD. Aussi, rien d’étonnant de voir Roy Woods s’enquérir d’informations et désireux d’en apprendre un peu plus sur Pablo et par extension, la jeunesse parisienne.
Les extraits qui vont suivre sont tirés de la journée passée ensemble. #TheConnect
Cela fait à peine cinq minutes que nous venons de nous rencontrer et Kirby, le tour manager de Roy Woods me demande un truc qui nécessite l’utilisation d’un cellulaire. N’ayant rien sur moi pour les dépanner, la team comprend dès lors que je n’ai pas de téléphone. Un détail qui a tout de suite attiré l’attention de Roy, qui m’en parle pendant facilement une bonne vingtaine de minutes. « J’ai essayé de m’en débarrasser aussi il y a quelques mois, c’était vraiment cool. Tu t’intéresses à d’autres choses pendant ce temps-là. Ça ouvre grave l’esprit… Mais au bout de deux semaines, avec le taf qui est le mien, c’est devenu compliqué d’être totalement déconnecté », déplore le jeune artiste.
Je lui explique avoir fait ça pour la lecture. Les mécanismes de concentration nécessaires à la lecture étant affectés par l’usage trop soutenu d’un smartphone, j’ai eu besoin de me débarrasser du mien pour pouvoir véritablement recommencer à lire. « J’ai moi-même déjà des troubles de la concentration. J’ai beaucoup de mal à maintenir une attention prolongée sur quoi que ce soit. J’ai toujours été très dissipé et ce, depuis l’époque scolaire. Je n’imagine même pas ce que c’est maintenant avec toutes ces années la tête fourrée dans les smartphones », répond-il pour sa part.
Au cours de notre ride, celui que l’on connait à l’état civil en tant que Denzel Spencer est tout de même reconnu par un fan. Un aficionados de musique qui nous dit composer ses propres prods. Roy Woods lui donne alors une adresse mail pour recevoir ses instrus, en plus de l’inviter au show qu’il donne le soir même. La chance ne sourit qu’aux audacieux, n’est-ce pas ?
En partant le canadien lance tout fier de lui un bref « Au revoir ». S’ensuit une courte discussion sur l’apprentissage des langues à l’école, plus particulièrement des liens et rapports entre les canadiens de Toronto et la langue française : « 90% de la population indienne de Toronto habite dans mon quartier, j’ai donc toujours entendu des mots ici et là. C’est un grand signe de respect de montrer à l’autre que tu parles sa langue. Ça m’a toujours importé d’apprendre quelques mots des différentes communautés qui m’entouraient. »
J’ai ensuite envie de savoir si le canadien écoute encore beaucoup de musique, et s’il y a quelqu’un en particulier qui a retenu son attention. « C’est vrai qu’il y a plein d’artistes qui, une fois qu’il se mettent vraiment dans le musique, arrêtent d’écouter les autres. Mais moi, je continue d’écouter tout un tas de musique. Je me focalise surtout les jeunes qui montent, j’adore ça. Il y a pas mal de nouveaux mecs hyper talentueux mais celui que j’écoute beaucoup en ce moment, c’est Gunna. Il est vraiment très chaud. Puis on a un son ensemble qui arrive », me confesse t-il, non sans une certaine excitation.
Je sais que les nord-américains activent leur connexions dès qu’ils atterrissent à l’étranger pour récupérer toutes sortes de saveurs illicites. Je me dis que Roy n’a pas du déroger à la règle et quand je lui demande ce qu’il pense de la beuh locale qu’il vient de récupérer, il grimace : « C’est de la merde ! [rires] Mais j’ai besoin d’être défoncé alors bon… J’aime bien être un peu dans un état léger alors je fume et bois à petites doses, juste avant de monter sur scène. »
Dans les backstages avant le show, Roy pointe du doigt mon bracelet. « Comment vous appelez ça ici et pourquoi tous les gars que j’ai croisé en ont ? C’est quelque chose que tout le monde porte ici ? » Je lui réponds qu’on appelle ça des graines de café. C’est une bijou que les grands de chez nous mettent, pour nous montrer qu’ils font leur business et nous envoyer un signe d’opulence. Tu en achètes quand tu as les moyens ou quand tu veux imiter les plus vieux, tout simplement.
Roy Woods : Comment on appelle ça en anglais ?
Pablo Attal : Dans les pays anglophones, c’est plus connu sous le terme « Gucci link ».
RW : LOURD ! « Gucci link », c’est ça. La prochaine fois que je viens en ville tu m’emmèneras dans ta bijouterie alors. Je m’achèterai une chaine comme ça. Comme un bonhomme de Paris. [rires]