Jordan (R)Évolution
Retour sur le début de la success-story des chaussures Jordan et leurs évolution au fil du temps. L’histoire de la Air Jordan commence paradoxalement de façon idéale. Dès les premiers matchs, la chaussure est jugée trop agressive car elle ne respectait pas le code couleur du règlement. Peut-être la meilleure manière de s’inscrire dans la légende. La marque est créée pour chausser un espoir grandissant de la balle orange, MJ, avec (déjà) pour ambition de révolutionner le domaine de la « signature shoe », autrement dit le business de la basket portant le nom du sportif l’inspirant.
Esthétiquement, la Jordan I est pourtant plutôt classique. Elle présente une forme déjà entrevue avec la Dunk, instaure la même année par le même designer Peter Moore. La légende de la Jordan I s’établit au gré du buzz de son interdiction et bien sûr des performances de MJ qui portera la « One » lors de son année rookie et sophomore, avant de chausser la Jordan II toujours pensée par Peter Moore. Ce second essai à la silhouette plus massive, reste parmi les modèles portés par Michael Jordan pendant sa carrière, le plus surprenant et certainement l’un des moins appréciés, à cause de la complexité de sa construction. Fabriquée en Italie, la Air Jordan II fut commercialisée à 100$ à sa sortie, quand la Jordan I commença à environ 20$ en 1985.
La Air Jordan troisième du nom marque un profond changement, le début d’une dynastie qui donnera ses lettres de noblesses à la marque. Ce changement est dûe à un nom : celui de Tinker Hatfield. Le designer historique de Nike sera à l’origine de la création de la série allant de la III à la XV. Même si son humilité l’empêche de l’avouer, il est peut-être la raison pour laquelle Jordan est resté chez Nike, après avoir songé à quitter le navire suite à une blessure au pied en portant la Air Jordan II. Après avoir vu la Jordan III, le basketteur change d’avis et décide de continuer l’aventure.
Bulle d’air visible, apparition du logo Jumpman, création de l’éléphant print… Tinker ne manque pas d‘idées pour rendre la paire épique. Populaires grâce à leur apparition dans la série publicitaire « Mars and Mike » mettant en scène Michael Jordan et Spike Lee, les III seront longtemps les favorites du joueur qui les immortalisera à plusieurs reprises par ses exploits sur le parquet. Après la III, les Air Jordan IV et V seront aussi de grands crus, des évolutions classiques directement inspirées de leur grande sœur, mais surtout des grands succès commerciaux dès leurs sorties.
La Jordan VI représente une première cassure dans l’esthétique amenée par Hatfield jusqu’alors avec sa silhouette montante et les différents éléments de fabrications incorporés sur la chaussure comme le renforcement de la zone du talon et des orteils. Modèle connu pour être celui du premier titre de champion, il est aussi l’un des plus appréciés par les fans de basket comme par le grand public. Comme la lignée III- IV-V, on peut isoler la VI, la VII et la VIII dans un même trio évolutif. La sixième inspire esthétiquement les deux suivantes tout en incorporant des nouveautés technologiques : amélioration du confort, de l’amorti, et de la protection du pied.
Avec ces six premières chaussures, Tinker Hatfield qui dévoile la Air Max au monde entier entre temps, s’impose comme un créateur de génie et un as dans sa capacité à surprendre son monde par les silhouettes originales de ses produits. Parmi les inventions mémorables qui sortiront du cerveau du designer, la Air Jordan XI, considérée par beaucoup comme la plus belle chaussure de sport jamais inventée. Cette paire créée avant le retour de Michael Jordan en NBA en 1996, n’était encore qu’un sample lorsque MJ joue avec pour la première fois. Complètement adoptée depuis, elle font l’objet d’un véritable culte.
Les créations de Tinker Hatfield accompagneront MJ tout au long de sa carrière NBA, jusqu’à la XIV au moment de sa retraite. Parmi les modèles qu’il a imaginé, aujourd’hui appelés les originaux (OG) car portés par His Airness pendant sa carrière, se trouvent quasiment que des succès. Des chaussures qui se voient rééditées chaque année et arrachées par les aficionados de Jordan et sneaker-addict du monde entier. Depuis la retraite définitive de His Airness, le label Jordan s’est quelque peu affranchi de Nike pour devenir Jordan Brand en continuant de développer la série débutée pendant la carrière du basketteur. Aujourd’hui c’est la Jordan XX9, réalisée par l’incontournable Tinker Hatfield, qui est à l’honneur au moment du trentième anniversaire de la marque.
Certes, quelque peu décriée par la sphère des sneakerheads pour leur aspect très basket-ball et moins lifestyle, les modèles Jordan « post–carrière » restent très appréciées par son cœur de cible, les basketteurs. Et c’est certainement là ou réside la force de la marque aujourd’hui, dans le mélange de sa production partagée entre les sorties rétro des modèles originaux satisfaisant ainsi l’énorme appétit des collectionneurs et dans l’accompagnement des athlètes vers la performance. Une performance qui n’est plus représentée par MJ himself mais par les différents ambassadeurs que compte la marque aujourd’hui parmi des superstars NBA ; Kawhi Leonard, Russell Westbrook, ou Chris Paul. L’expansion de Jordan va aujourd’hui au-delà du basket puisque ses produits équipent et sponsorisent aujourd’hui des sportifs du la ligue de baseball, de football américain ou encore des courses de NASCAR.
La vie fait bien les choses, cette association entre un joueur et une marque de sport aurait pu ne durer que le temps d’un essai, d’une carrière. C’était sans compter sur l’alliance entre l’entité Jordan et l’un des sportifs les plus charismatiques pour forger un empire unique en son genre et une success-story qui n’arrivera certainement plus à l’avenir. The rest is history.