Panama Bende : « Le rap nous lie, mais nos liens sont beaucoup plus forts que le rap »

On en attendait sept, ils n’étaient finalement que trois. À plusieurs reprises, Elyo, ASF et PLK ont bien essayé de joindre leurs collègues, de s’assurer de leurs présences respectives… en vain. Un des absents était aperçu la veille à Marseille. Un autre se remettait d’une nuit visiblement mouvementée. Pas de nouvelles de Lesram, tandis qu’Ormaz nous fera miroiter une hypothétique arrivée.

Âgés de 20 à 23 ans, les membres du Panama Bende sont le symbole de cette jeunesse résolument entreprenante, qui s’affranchit des règles faute de pouvoir les respecter. Celle qui « écoute toujours les conseils, mais jamais les consignes ». Sa tête est pleine de rêves, de tourments, de projets. ADN en est un. Homogène, structuré, rigoureux, il démontre que cette jeunesse peut être tout ce qu’on voudrait qu’elle soit quand c’est la passion qui l’anime.

Photos : @lebougmelo

 

Ca fait déjà quelques années que le nom du Panama Bende circule, et c’est seulement maintenant que vous passez le cap du projet collectif long format. Pourquoi maintenant ?

Elyo : On a pris notre temps, en fait. On était chacun sur nos trucs en solo et puis en vrai on était jeunes, on a 20 piges en moyenne à peu près. On commence à vieillir là, on prend de l’âge [rires]. Il nous fallait le temps de se professionnaliser. L’année dernière par exemple, on a sorti un EP avec 3 clips vachement espacés dans le temps, c’était compliqué à organiser.

Au-delà de ça, il fallait le temps de se faire des contacts, de rencontrer des gens dans le milieu, de prendre nos marques, etc. On a pris le temps de ramener un projet qu’on considère abouti.

Aladin a été le premier à faire parler de lui, puis il y a eu une profusion de projet et de morceaux solos ou en duo. Vous aviez à coeur que le public identifie les univers respectifs de chacun avant de vous lancer ?

ASF : À la base, ce n’est pas vraiment pour ça, non. Dans le groupe, on ne se fixe pas de limites. Si toi, t’es déter’ à faire 10 projets en parallèle du projet Panama, fais-les. Si t’as la flemme et que t’as envie de sortir juste un son, sors ton son. On sait que c’est une des forces du groupe que chaque membre ait son propre univers, mais on ne se motive pas à sortir plus de morceaux dans cette optique là. On le fait parce qu’on a tous besoin de faire notre truc, on kiffe et c’est ce qui nous donne la force d’avancer avec le groupe.

Elyo : D’un côté, les projets du groupe prenaient plus du temps, on savait que ça nécessitait plus de travail donc c’était cool que ceux qui voulaient sortir du son entretemps puissent le faire.

« Il y a plein de rappeurs qui ne rappent pas forcément pour l’amour de la musique mais plus pour se donner une image, pour incarner les mecs qu’ils auraient aimé être. Il y a ceux qui font de la musique pour se montrer, et ceux qui font de la musique parce qu’ils aiment ça. »

Pendant toute l’écoute du dernier projet, j’ai eu en tête une phase d’Alpha Wann qui faisait : “J’rappe sur le rap, parce qu’à cause de lui je n’ai plus de vie”. Vous parlez énormément de rap, de la manière dont vous écrivez vos morceaux, de ce que ça représente pour vous. J’ai l’impression que votre génération a remis un peu de passion dans le jeu.

Elyo : C’est Zeu qui disait ça dans une autre interview, quand on nous demandait ce qu’on fêtait (par rapport à notre morceau “Fêter”), il avait dit qu’on fêtait le rap. Le rap, c’est notre passion au quotidien, c’est notre culture, on vient de là.

ASF : Après si ca se ressent c’est tant mieux, mais on le fait pas spécialement “pour montrer que”. C’est vraiment une passion. Par contre, je ne suis pas sûr que ce soit générationnel. Parce qu’il y a plein de rappeurs qui ne rappent pas forcément pour l’amour de la musique mais plus pour se donner une image, pour incarner les mecs qu’ils auraient aimé être. Il y a ceux qui font de la musique pour se montrer, et ceux qui font de la musique parce qu’ils aiment ça.

De ce côté “passionné” ressort aussi cette volonté de kicker sur toutes sortes de productions. C’est quelque chose que vous mettez beaucoup en avant dans vos textes.

Elyo : À l’époque des open-mics, quand il commençait à y avoir une distinction entre le boom-bap d’un côté et la trap de l’autre, tu devais être capable de kicker sur n’importe quoi. Encore plus maintenant, vu qu’il y a le boom-bap, la trap et 10 000 autres genres. Et nous, on a beau venir du rap, on kiffe toutes sortes de styles musicaux. On ne se réveille pas un matin en se disant “il faut qu’on fasse tel ou tel type de son”, mais on a une certaine ouverture musicale qui fait qu’on est capable de s’adapter.

PLK : Des fois on va se retrouver le soir, tous ensemble, il va y avoir un peu de musique, un son house qui va passer, tu peux être sûr qu’un de nous va se mettre à rapper dessus. Sans but précis, juste comme ça, pour rigoler, une petite impro. Tout ça pour dire que de nous-mêmes, on a ce truc de vouloir s’essayer à tout. Tu vas faire du bruit sur la table, on va poser un texte. C’est aussi pour ça qu’on rappe sur le rap : on fait ça toute la journée, frère.

ASF : Je vais avoir l’impression de me répéter, mais autant c’est cool que les gens remarquent qu’on est capable de rapper sur tout, autant faut qu’ils sachent bien que ce n’est pas spécialement calculé. On reçoit une prod, si on aime bien, on rappe dessus. On n’est pas dans la démonstration, on se prend pas la tête. On fait ce qu’on aime : si ça plait aux gens tant mieux parce que c’est comme ça qu’on va vivre, si ça plait pas, tant pis.

Elyo : On est libre artistiquement.

PLK : Ca se voit de toute façon, on n’a même pas besoin de le dire. Quand tu écoutes un morceau comme “Sommet” et un morceau comme “Pas encore”, il y a vraiment une grande différence. On peut taper où on veut. Si on avait quelqu’un derrière nous, il nous dirait sûrement “gros, c’est pas des trucs à faire”.

Elyo : Et encore, parce qu’on a beaucoup de trucs coffrés – que ce soit en solo où en groupe – qui vont encore plus loin en terme d’ouverture artistique.

Quand vous parlez, on dirait vraiment qu’il n’y a jamais de calcul dans ce que vous faites. Dans quelle mesure vous “pensez” vos projets ?

Elyo : Un minimum, quand même. Rien que le fait qu’ADN ait été fait dans la durée…

PLK : … ça nous a poussé à la réflexion.

Elyo : Voilà. Le projet est censé aller dans les bacs, on le veut plus abouti, donc on s’est quand même posé quelques questions. Mais dans la démarche de fond, on reste très libres.

Dans la mesure où vous êtes tous très versatiles, comment vous parvenez à définir un ADN musical, vu que c’est le nom de votre projet ?

Elyo : C’est la grande question qu’on se pose nous-mêmes. Ca arrive qu’on ait des désaccords entre nous, mais musicalement, quand on est au studio, ça coule de source.

ASF : Si tu regardes en solo, il n’y en a pas un qui a le même délire que l’autre, chacun est dans son propre truc. Mais quand on se met en groupe…

Elyo : … il y a une alchimie qui se créée. Comme on a beaucoup d’influences différentes, mais qu’on se connaît tous très bien les uns les autres ; quand on reçoit une prod, on a une manière de l’aborder qui est commune.

PLK : On se connait par coeur. On va entendre la prod, moi je vais dire “ok, moi à ce moment là j’imagine bien ASF au refrain” et tu peux être sûr que les autres vont être d’accord. Même Grünt par exemple, quand tu vas là-bas on te dit “tu as 30 minutes, tu connais pas les instrus, démerdez-vous et c’est filmé, faites pas les cons”. Dans ce genre d’exercice, tu sais qui est capable de reprendre à tel moment, qui va froisser telle ou telle prod… On se connait par coeur.

ASF : Des gros morceaux bien trap, bien arrogant, je sais que c’est PLK qui commence par exemple… [rires]

Du coup, comment vous définissez l’ADN du Panama Bende ?

Elyo : Faut écouter le projet… [rires]

ASF : En vrai, il ne faut pas seulement écouter le projet, parce que honnêtement c’est 2% de ce qu’on est capable de faire. On l’a fait comme ça, sur une période assez longue, mais au final, même si on a pris du temps pour le faire, on n’a pas tout essayé encore. On peut faire plein d’autres choses. Puis, on reste des rappeurs “rappeurs” et on trouve presque qu’il n’y a pas suffisamment de rap dans ce projet. Les gens peuvent nous attendre sur plein de trucs, on n’a rien montré encore.

Elyo : Disons que ce projet là, et tout ce qu’on a fait avant, c’est l’ADN au sens “carte d’identité”. C’est le stade le plus primitif, la base.

PLK : Après il y a toute une évolution qui suit derrière.

« Pour reprendre l’exemple de “Gros Plavon”, c’est limite mieux que les gens se disent “il est où PLK ?”, plutôt que je lâche un couplet que je n’aurais pas forcément kiffé. Franchement cette prod, je ne sentais pas que j’allais la frapper comme il fallait que je la frappe. Et je déteste ça. Tout ce qui est approximatif, ça me fait chier en vrai. »

Comment vous conciliez cohésion de groupe et identité(s) personnelle(s) ?

PLK : Chacun range son égo dans son t-shirt, frère. On a tellement roulé dans toutes les galères du monde ensemble que je ne peux pas… Je sais pas comment t’expliquer. Entre nous, il n’y a pas de rap. Enfin… Le rap nous lie, mais en même temps, nos liens sont beaucoup plus fort que le rap. Même si on arrêtait le rap, tu nous verrais toujours ensemble. À l’arrivée, il n’y a même pas d’égos là-dedans. Je connais sa mère, il connais la mienne, tu vois ce que je veux dire ?

Je ne parle pas forcément d’égo, mais plutôt de la manière dont vous allez intégrer vos univers respectifs dans une dynamique de groupe.

ASF : C’est comme on disait tout à l’heure, en vrai nous-même on ne sait pas trop… [Ils éclatent de rire] On s’entend tellement bien, on se connait tellement bien qu’au final on apporte tous notre touche et ça donne quelque chose de cohérent. C’est la magie du truc. On s’est retrouvé à sept, on a choisi le groupe et on a fait les bons choix, c’est tout. C’est sept entités qui collent bien ensemble.

PLK : Chacun est à sa place. En vrai, Panama Bende… Je sais pas comment t’expliquer… C’est sept cartes posées et chacune est à sa place. Si tu bougeais ne serait-ce qu’une carte, ça ne marcherait pas. C’est vraiment parce que les sept sont là. Même en studio : il suffit qu’on soit six au lieu de sept, tu sens que quelque chose ne va pas. Comme s’il y avait une roue crevée. On se complète, le mélange se fait automatiquement.

Elyo : Nos gros sons on les a fait à sept. Systématiquement. Quand il en manque un, c’est un bon morceau, lourd, pas de soucis, mais il manque un truc.

J’ai l’impression que le public le ressent aussi. Sur “Gros Plavon” par exemple, PLK ne pose pas et j’ai vu beaucoup de commentaires qui semblaient le regretter.

ASF : Après on réfléchit selon la cohérence artistique. On aurait pu dire à PLK “wesh, t’es sérieux, tu poses pas ? Vas-y on est tous dessus, pose !”, mais non il n’y a pas de ça. Si t’as pas trop kiffé la prod, ou que tu sens pas trop la vibe, ne pose pas dessus. Il y a probablement des fans qui vont moins kiffer, et tu en as d’autres qui vont l’attendre deux fois plus sur le morceau d’après.

PLK : Et puis même, pour reprendre l’exemple de “Gros Plavon”, c’est limite mieux que les gens se disent “il est où PLK ?”, plutôt que je lâche un couplet que je n’aurais pas forcément kiffé. Franchement cette prod, je ne sentais pas que j’allais la frapper comme il fallait que je la frappe. Et je déteste ça. Tout ce qui est approximatif, ça me fait chier en vrai. Le morceau à six, je me le prenais en pleine tête. Si je me rajoute dessus et que je force mon couplet, je sens que le son va être long, ça va me soûler et ce ne serait pas naturel. Donc on a fait le truc naturellement, comme on a toujours fait et voilà. On savait aussi que dix jours après on allait balancer un autre extrait…

Vous êtes un collectif de jeunes, frais, avec des personnages très marqués. Il va y avoir Lesram dans un registre plus crapuleux, PLK qui fait souvent dans l’insolence, ASF qui est très philanthrope dans l’âme, etc. Vous n’avez jamais eu peur de passer pour une sorte de “boys band du rap” ?

Elyo : Non, même pas. C’est quelque chose de propre aux boys band et aux groupes en général.

ASF : Dans le rap aujourd’hui, il n’y a que des bad boys. Mais vas-y, ca sert à rien parce que tu sais très bien que certains ne sont pas des bad boys.

PLK : Je dirais même que 98% ne sont pas des bad boys… [rires]

ASF : Donc autant qu’on soit nous-mêmes, on ne va pas tous faire les bad boys. C’est ce qui fait notre force : chacun a sa personnalité et ça se ressent dans nos morceaux.

PLK : Mais de toute façon – je vais retourner la question – si on avait été similaires, c’est-à-dire pas de personnages, chacun sur le même truc, ça aurait été super nul. Alors tant mieux qu’on ait tous nos propres personnages.

ASF : Tu te ferais chier là, on répondrait tous la même chose… [rires]

Elyo : Ça nous enrichit d’avoir des univers différents.

Au-delà de ça, il y a une dimension très générationnelle dans votre musique, quelque chose de fait “par et pour les jeunes”. Par exemple, dans le morceau “Mon squad”, Elyo va parler des “petits” qui l’écoutent.

ASF : Je lui avais dit de dire “les grands”… [rires] Mais encore une fois ce n’est pas vraiment voulu…

Elyo : [Il coupe] Ah si, c’est voulu.

PLK : C’est bon frère, c’est très bon.

Vous ne vous dites pas des fois, que ca peut restreindre la portée de votre art, notamment auprès des auditeurs plus matures ?

Elyo : Je ne pense pas, c’est juste qu’on est jeunes et forcément, chaque génération a son propre délire.

PLK : De toute façon, la majorité des gens qui écoutent du peu-ra, ce sont des jeunes. Si tu fais de la musique pour les darons, tu vas vendre 4 CDs frère. Tu vois ce que je veux dire ou pas ?

ASF : Et puis même, au final, ceux qui marchent le plus – peut-être que je me trompe – mais les Jul ou PNL, ils sont vachement écoutés par les jeunes.

Quand j’ai dis que vous faisiez de la musique “pour les jeunes”, j’ai vu Elyo acquiescer tout de suite…

Elyo : En fait il y a deux choses : d’une part, il y a une volonté de booster les gens, parce qu’on voit bien que dans notre génération, il y a plein de jeunes qui font plein de jets-pros différents que ce soit dans l’art, dans la com’, ou autre, et on a envie de pousser ces gens-là…

ASF : Même vous, en vrai. Que des jeunes entrepreneurs.

Elyo : … et d’autre part, par rapport à l’âge, ce ne serait pas cohérent si à 20 piges on pensait faire des textes qui parlent à des gens qui en ont 50. À chaque période de la vie son vécu. Nous on parle du nôtre.

PLK : Ce serait bizarre de faire l’ancien à 19 ans… [rires]

Elyo : Quand on aura 25 ou 30 piges, ça se ressentira dans nos textes. Parce que ce qu’on vit, ça correspond à notre tranche d’âge. Ça parlera aussi à des plus petits. Ça n’aurait pas de sens de donner des leçons de vie à 20 piges. Et puis en vrai, il y a quand même des gens plus vieux qui écoutent nos sons et qui kiffent. Ce n’est pas forcément le coeur de cible, mais c’est le cas, ça arrive.

ASF : Moi je connais v’la les darons qui m’ont dit “je n’écoute pas de rap, mais mon fils m’a fait écouter ce que vous faites, c’est grave lourd.” Au final, ça parle quand même à certaines personnes plus âgées.

Elyo : Il y a aussi plein de darons qui veulent être jeunes dans leurs têtes.

PLK : La crise de la quarantaine, ça nous réussit ! [rires]

« Ce n’est pas en un projet que tu pètes sa mère. Là on sent que ça grimpe, mais il va encore falloir se retrousser les manches, sortir deux, trois, quatre projets. Mais tranquille, on a la dalle, on va attendre. »

ADN est votre premier projet collectif qui atterrit dans les bacs. Est-ce que vous avez une appréhension vis-à-vis des ventes ?

Elyo : Plus ou moins. Après on s’attend pas à faire disque d’or après-demain, je ne te mens pas. On a conscience qu’il nous reste encore beaucoup de travail.

PLK : On n’a pas du tout les chiffres encore mais on sait que les premiers projets c’est rarement ceux qui vendent le plus. C’est très rare qu’un mec arrive, et dès son premier projet ça buzz de ouf. Le plus souvent il faut construire son buzz. Et puis de toute façon, nous on est déjà satisfait. On est à Paris, on fait une Cigale complète… c’est que du bonus en fait. Maintenant, ça ne veut plus rien dire parce qu’avec les streams, tu ne peux même pas savoir si t’es écouté de ouf ou si on achète vraiment ton disque.

ASF : En vrai, si on parle d’argent, on savait qu’on allait pas toucher des millions avec un projet. Déjà, on est sept… donc vas-y, c’est compliqué, ensuite on est en indé donc il y a plein de trucs à rembourser nous-mêmes. Après sans parler de ventes, vu tout ce que le projet va nous apporter, même si on vend pas de ouf, c’est que du positif. Là on a eu des interviews un peu partout, tous les médias voient bien qui on est, on a des attachés de presse avec qui on bosse et qui sont archi-déter avec nous, nous-mêmes on commence à être plus pros… il se passe plein de trucs. Donc même si on vend 4 CDs, franchement tout ce qu’il y a de positif…

PLK : Euh… 4 CDs j’aurais le seum quand même ! [rires]

Elyo : On sent que de toute façon il y a plus de gens qui nous suivent sur les réseaux, il y a plus de gens qui viennent à nos concerts, nos sons tournent de plus en plus. Hier on était chez notre tourneur qui nous disait que NTM, leur première salle à Paris, ce n’était pas La Cigale, loin de là. Ça nous fait du bien d’entendre des trucs comme ça, parce qu’on se rend compte avec de la perspective qu’il faut être patient, qu’il faut charbonner. Ce n’est pas en un projet que tu pètes sa mère. Là on sent que ça grimpe, mais il va encore falloir se retrousser les manches, sortir deux, trois, quatre projets. Mais tranquille, on a la dalle, on va attendre.

Les succès de Nekfeu – qui est un peu le porte-drapeau du créneau rap auquel vous êtes rattachés – vous font-ils dire qu’il y a réellement une place “commerciale” à prendre pour votre musique ?

Elyo : En vrai, dans tous les cas, je pense que Nek’ et tous les gens qui ont gravité autour de lui ont donné un second souffle au rap. Ça a été dit et répété par plein de médias. Puis en vrai, ça marchait quand même bien avec ses groupes. Après c’est sûr qu’il y a différents niveaux de succès, mais 1995 avait déjà fait ses bails quand même. Ils étaient en indé, à une époque où tout était axé sur les majors. De mon point vue, c’est surtout ça qu’ils ont amené. Ce côté “on peut le faire par des biais différents”.

ASF : Au-délà des ventes, Nekfeu a été une source de motivation pour tout le groupe. C’est un mec qu’on a connu avant son succès…

PLK : Moi je l’ai connu j’avais 12 ans. Il rappait même pas encore. Donc quand un mec tu le connais depuis longtemps comme ça…

ASF : … tu sais que c’est un gars comme toi.

PLK : Moi et Alpha on était dans le même collège, tu vois ? Bon lui il était beaucoup plus grand que moi, mais du coup tu sais qu’il est passé par les mêmes trucs. On est du même quartier, il habitait dans un bâtiment voisin, depuis tout petit je le vois. Un moment tu te dis “ah ouais mais pourquoi lui il y arrive et moi je n’y arriverais pas ?”. Il y arrive, il travaille… bah j’ai juste à travailler. À l’ancienne c’était le premier à prendre mes textes et à me dire “ça c’est pas bon, ça non plus, ça non plus, donc maintenant applique-toi !”. À l’arrivée, ca te fait progresser. Même maintenant quand j’écris, des fois je pense à ce qu’il pourrait me dire.

ASF : Et puis ces mecs là, quand tu les croises, tu vois à quel point ils sont humbles… C’est trop une motivation.

Une autre particularité de Nekfeu, c’est d’avoir plus marché en solo qu’en groupe. D’après vous, il y a encore un avenir pour des groupes de rap aussi nombreux que le vôtre ?

PLK, ASF et Elyo : Ouais.

Elyo : On ne le ferait pas si on ne le pensait pas.

ASF : Puis même si on devait se lancer en solo, il y a quelque chose de très homogène en terme de niveau dans le Panama Bende. Il n’y en a pas un qui aurait moins de chance de percer qu’un autre. Personne ne graille personne. Comme chacun a son propre délire, tu pourrais très bien voir Lesram péter en mode street, puis voir un Elyo arriver avec un délire plus chanté, et tout baiser dans ce délire. Il ne se mangeront pas.

PLK : C’est archi-éclectique. À une époque on avait fait un truc qui s’appelait “Les dimanches du Panama” où toutes les semaines il y avait un morceau ou un freestyle de chez nous qui sortait, mais il n’y avait jamais rien qui sonnait pareil, tu vois ce que je veux dire ? Pour te dire, j’arrive même à différencier nos publics respectifs maintenant. Genre Aladin et moi, on se rejoint sur plein de points, mais je sais que de mon côté, j’ai une fan base qui va être un peu différente de la sienne. Et pourtant ce sont des gens qui nous retrouvent en groupe et qui vont nous kiffer ensemble. Jusqu’à maintenant l’alchimie elle marche, il faut que ça continue.

Et votre avenir du coup, vous l’imaginez comment ?

Elyo : Bah Bercy, dans six mois… [rires]

 

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