Zdar nous a quitté : ce que le rap doit à la moitié de Cassius

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Philippe Zdar n’est plus, et sa disparition laisse un grand vide dans le monde de la musique. Du côté de l’électro, où son oeuvre au sein de Cassius l’a érigé en pionnier de la French touch, mais pas que. Retour sur ses attaches hip-hop. 

« Je fais tout ce qui est possible de faire dans la musique. » C’est ainsi que Zdar décrivait, en 2011 pour Brain, son métier. Sa disparition ce mercredi 19 juin 2019, des suites d’une « chute accidentelle par la fenêtre d’un étage élevé d’un immeuble parisien », dixit son manager Sébastien Farran, nous rappelle au mauvais souvenir de celle de DJ Mehdi, décédé en septembre 2011 dans des circonstances similaires. Moitié du tandem électro Cassius, Philippe Cerboneschi – de son vrai nom – nous a donc quitté à l’âge de 50 ans. Et si la trace qu’il a laissé en son sein n’est peut-être pas évidente pour tous, le monde du hip-hop aurait tort de ne pas s’émouvoir de sa mort comme il a pleuré celle de l’ancien membre de la Mafia K’1 Fry.

Car, à l’instar de DJ Mehdi, Zdar était un de ces artistes sans frontières, capable de puiser le meilleur du rap, comme de l’électro ou du rock, et dont l’oeuvre a largement contribué au décloisonnement des genres musicaux. Arrivé à Paris en provenance de Savoie dans le milieu des années 80, Philippe Cerboneschi commence en tant qu’ingé son au studio Marcadet, où il assiste notamment Dominique Blanc-Francard, producteur de renom et père d’Hubert – qui deviendra son plus illustre compagnon de route. Là-bas, il croise la route de quelques unes de grandes icônes de l’époque, parmi lesquelles Serge Gainsbourg, Étienne Daho ou Vanessa Paradis. Sauf que son truc à lui, c’est le rap ; cette nouvelle musique en vogue dont il apprécie la fougueuse énergie.

Zdar s’y essaye en duo avec Boom Bass, au sein d’une formation hybride appelée La Funk Mob. Au début des années 90, les deux hommes se retrouvent à travailler avec une émergente scène rap française. Premier fait d’armes notable dans le genre : l’album Qui sème le vent récolte le tempo du jeune MC Solaar, où ils opèrent aussi bien à la production de quatre morceaux (dont le titre éponyme) qu’en tant qu’ingénieurs du son. Mixé par leurs soins, « Bouge de là » deviendra le premier single à véritablement ouvrir au rap les portes du succès mainstream. Leur collaboration avec Claude MC se poursuivra quant à elle sur pas moins de quatre albums, avant qu’ils ne décident d’emprunter une autre trajectoire musicale. L’acte de naissance de Cassius.

Des collaborations avec Pharrell, Mike D ou Ghostface Killah

« Le hip-hop nous a permis de mettre un pied dans la création, mais c’est la techno qui a fait de nous des vrais acteurs de la musique », reconnaitra d’ailleurs Zdar a posteriori. Dès 1999, leur premier disque sorti en 1999, la nouvelle formation de Philippe Cerboneschi et Hubert Blanc-Francard s’impose comme pionnière de la French touch, ce son électro si singulier qui séduit au-delà même des frontières de l’Hexagone. Le nom de Cassius s’inscrit alors aux côtés de ceux d’artistes comme Daft Punk, Air, Phoenix, Laurent Garnier ou Étienne de Crécy. Mais aussi radical soit-il, leur virage artistique de leur fait aucunement oublier leurs premiers émois, qu’ils continuent de distiller au compte-gouttes tout au long de leur seconde carrière musicale.

Sur 1999, le titre « Somebody » reprend ainsi un sample de « DWYCK » de Gang Starr. Leur second album Au rêve fait figurer dans son tracklisting un featuring avec la légende du Wu-Tang Ghostface Killah, tandis que Pharrell Williams s’invite pour sa part sur « Eye Water », titre extrait du projet 15 Again, sorti en 2006. Le dandy des Neptunes retrouvera Cassius dix ans plus tard sur l’album Ibifornia, au même titre que le Beastie Boy Mike D, venu prolonger le temps de deux titres une collaboration initiée avec Zdar sur Hot Sauce Comittee (Pt. 2), coproduit par le compositeur français. En 2011, ce sont finalement les deux mastodontes Jay-Z et Kanye West qui rendront hommage au duo, en reprenant leur hit « I <3 U SO » sur « Why I Love You », extrait du désormais classique Watch The Throne. La sortie de Dreems, le cinquième album de Cassius, est toujours prévue pour ce vendredi 21 juin.

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