La fabuleuse histoire de Rae Sremmurd
Voyages quadridimensionnels, créatures fantastiques et androïds malheureux : voici comment Swae Lee et Slim Jxmmi sont devenus l’entité Rae Sremmurd.
Illustrations : Bobby Dollar
Au début des années 1990, le jeune producteur Rico Wade rêve de faire d’Atlanta une ville centrale pour le rap. Il commence par donner une localisation physique à son utopie, en transformant un cachot sous terrain en studio coupé du temps et de l’espace. André Benjamin et Antwan Patton, respectivement originaires de Buckhead et de Savannah, sont un jour venus s’y perdre, et par on ne sait qu’elle magie, en sont ressortis transformés en André 3000 et Big Boi, deux des plus grands rappeurs de notre galaxie.
Au début des années 2010, le jeune producteur Mike Will Made-It veut consolider le statut de capitale du rap revendiqué par Atlanta. On raconte qu’il fait construire son studio au dessus d’un lieu magique. Khalif Brown et Aaquil Brown, deux frères originaires de Tupelo, sont un jour venus s’y perdre, pour en ressortir transformés… Non, Swae Lee et Slim Jxmmi ne sont pas les nouveaux OutKast. Voici comment ils sont devenus Rae Sremmurd.
Nés en Californie, Swae Lee et Slim Jxmmi ont longtemps suivi leur mère militaire à travers l’Amérique. Tupelo, Mississippi, est de tous leurs points de chute celui qu’ils ont finalement appelé « maison ». Ils s’inspirent d’ailleurs de cette vie de bourlingues pour nommer leur premier groupe, Dem Outta St8 Boyz. Inspirée par Soulja Boy et tout le swag rap d’Atlanta, leur musique est juvénile et festive, performée habillés de grands tee-shirts colorés, pour des concerts improvisés dans les maisons abandonnées et les lycées de Tupelo.
En 2011, ils rencontrent le producteur P-Nazty, cousin de leur DJ et membre d’EarDrummers, le label récemment monté par Mike Will Made-It. Quelques mois et allers-retours plus tard, après avoir quitté l’école et leurs petits boulots à l’usine, Swae Lee et Slim Jxmmi s’installent dans les studios de Mike Will à Atlanta, transformés en incubateurs à jeunes artistes.
Le duo adopte le palindrome Rae Sremmurd pour marquer son affiliation au label et, à la manière du trio Travis Porter, donner l’impression de n’être qu’une seule personne. Pour Mike Will, qui semble avoir décelé en eux un quelconque potentiel, il s’agit de tailler et polir ces deux minuscules diamants bruts pour en faire des pop stars intersidérales.
Depuis les sous sols d’EarDrummers, Swae Lee et Slim Jxmmi ont accès à une discothèque semblable à la Bibliothèque de Babel. Elle est composée d’un nombre indéfini, peut-être infini, de galeries hexagonales, et d’une interminable suite d’étages inférieurs et supérieurs. Vingt longues étagères, à raison de cinq par côté, couvrent tous les murs moins deux ; leur hauteur, qui est celle des étages eux-mêmes, ne dépasse guère la taille d’un rappeur normalement constitué. Chacun des pans libres donne sur un couloir étroit, lequel débouche sur une autre galerie, identique à la première et à toutes.
Swae Lee observe que toutes les partitions présentes sur les étagères, quelques divers qu’elles soient, comportent des éléments égaux servant à décrire les caractéristiques du son musical. Il fait également état d’un fait confirmé par Slim Jxmmi : il n’y a pas, dans la vaste discothèque, deux partitions identiques. De ces prémisses incontroversables ils déduisent que la discothèque est totale, et que ses étagères consignent toutes les combinaisons possibles de notes, de signes, de silences, de textes, c’est-à-dire tout ce qu’il est possible d’exprimer en musique.
Guidés par les consignes de Mike Will, les deux frères avancent dans ce dédale et piochent sur les étagères des partitions, afin de nourrir leur musique. Parmi elles, il y a d’abord des albums d’hier, majoritairement venus d’Atlanta.
On imagine aisément qu’ils soient, par exemple, tombés sur la musique de Kilo Ali, l’un des grands architectes du rap local. Il est le père spirituel de toute une lignée passant par June Dog puis Fabo de D4L, menant jusqu’à Young Thug. À la fin des années 1980, il fait partie de ceux qui importent à Atlanta la Miami bass, bande son uptempo des clubs, qui fait suer et trembler les cuisses à coups d’éructations salaces et de scratchs.
Avec le single « Perfume » en 1993, Kilo commence à se différencier de ses influences. Plus funk, les rythmes de Miami y ont aussi été ralenti par l’air de Géorgie. Ce sont les prémisses d’une sorte d’Atlanta bass, genre qui a du mal à avoir une existence livresque officielle mais qui existe bel et bien, définitivement institutionnalisée avec la compilation So So Def Bass All Stars, et son hit intemporel « My Boo » des Ghost Town DJ’s. Perméable au r&b, cette ATL bass ouvre une porte entre le rap et le chant, la rue, le club et la chambre à coucher.
Si les Rae Sremmurd ne devaient garder qu’un seul des titres de Kilo Ali trouvés sur les étagères de la discothèque, ce serait probablement « Baby, Baby ». Extrait d’Organized Bass, son opus magnus sorti chez Interscope en 1997, la chanson et son clip vidéo contiennent la moitié de leur ADN : des basses dansantes, des lunettes de skis vissées sur les fronts, des drôles de gimmicks en voix de tête et des nappes vaporeuses. À croire que Kilo est le père biologique disparu de Jxmmi et Swae Lee.
En avançant, les deux frères découvrent le parcours de Mr. Collipark, celui qui a révélé les Ying Yang Twins et Soulja Boy en les signant sur son label. Sous le nom de DJ Smurf, il participe au développement de cette ATL bass, avec des titres comme « Ooh Lawd » en 1995 ou « Girls » en 1998, puis alimente les radios avec ses productions pour David Banner, Bubba Sparxxx, Young Jeezy ou Ciara. Ses rythmes entrainants et ses synthétiseurs froids comme une barre de strip-tease forcent les rappeurs à réduire leur texte à un gimmick, à jouer avec le son de leur gorge et les flows de Too $hort.
Dans une salle adjacente, ils retrouvent les groupes de leur enfance, D4L, Dem Franchize Boys, F.L.Y. et évidemment Travis Porter. Il y a ces artistes coiffés comme des footballeurs européens, qui chantent dans des t-shirts aux couleurs des Looney Tunes parce qu’ils donnent autant d’importance à leur style qu’à leur musique. En tête, Yung L.A. et sont « Ain’t I », derrière, tout le contingent de ce qu’on appelle parfois le swag rap.
Avec leurs mélodies minimalistes et volontairement répétitives, on qualifie parfois ces chansons de ringtone rap. Les productions ressembles à des bips de téléphone, peut-être parce qu’elles sont pensées pour pouvoir être vendues comme sonneries de portable. Adaptée aux nouveaux modes de consommation, et accompagnée de danses faciles à reproduire pour la rendre virale, le roi de cette musique, les Rae Sremmurd le savent déjà, c’est Soulja Boy.
Au sortir de leur premier aller-retour dans l’infinie discothèque, Swae Lee et Slim Jxmmi ont remonté toute une partie de l’histoire du rap d’Atlanta, de ses prémices jusqu’à leurs influences directes. Un voyage matérialisé par SremmLife, leur premier album.
Ce disque dégage une énergie que l’on peut qualifier de positive, de joyeuse, de cartoon, de juvénile. Comme si leur jeunesse n’était pas assez évidente, ils la revendiquent sans cesse, l’accentue en poussant les aigus d’auto tune, en joue en adaptant leurs textes pour les réseaux sociaux ou en découpant leurs mélodies pour qu’elles tiennent dans un Snap ou un Vine.
À l’époque, le public n’identifie pas complètement les deux frères et Rae Sremmurd pourrait n’être qu’une seule personne. Si on devine ce qu’ils écoutent, si on entend ce qu’ils aiment, ils ne racontent rien d’eux et de leur vie. À un moment où triomphe la rage et les récits de dépression, leur joie exubérante est parfois vue comme une faiblesse. Comparés à Kriss Kross, ils seraient creux, préfabriqués, des marionnettes façonnées par Mike Will. L’animateur radio Ebro Darden les soupçonne même de ne pas écrire leurs textes.
En plus d’être de pures fabulations, il s’agit d’un faux procès, l’intérêt de leur musique étant ailleurs. Leur apparente simplicité et le faux minimalisme des productions demandent une véritable habileté. Toutes ces forces sont résumées par « No Type », sa progression mélodique minutieuse, sa superposition d’éléments discrets qui permet sa fraicheur et son efficacité, la complémentarité qu’il s’y dessine entre Swae Lee le bonbon chanteur et Jxmmi la pile électrique… Trop tard, l’équipe EarDrummers est touchée par les critiques, et s’atèle immédiatement à les contredire une à une.
De retour dans les sous-sols de leur studio, les frères Sremmurd s’enfoncent d’avantage dans la discothèque. Sans oublier ce que leur première excursion a apporté, il faut aller plus loin, et le rap d’Atlanta étant la mutation de sons venus d’ailleurs, autant remonter la source.
Après celui de Miami, c’est un courant venu de Memphis qui coule sur la ville. Les basses tapent de plus en plus fort, de plus en plus lentement et, sauvage, hyper synthétique, épuré, répétitif, presque morbide, nait l’ATL crunk en 1997, hurlé par Lil Jon et ses EastSide Boys. Leur modèle est alors la Three 6 Mafia de Juicy J et DJ Paul, et les frères Brown examinent à leur tour le parcours de ces indétrônables rois de Memphis.
Pour arriver à ne faire qu’un avec Mike Will Made-It et son équipe de producteurs, ils passent du temps dans des pièces dédiées à la musique moderne de Virginie. Dans les années 2000, des mutants comme Timbaland ou les Neptunes y sont à la fois interprètes, hommes orchestre, marionnettistes de rappeurs et d’artistes pop. Des figures polymorphes qui inspirent chacun des membres d’EarDrummers de façons différentes : Mike Will se rêve super producteur à la Timbo, Swae Lee, crooner gracieux à la Pharrell Williams.
Impossible d’être certains de tout ce qui nourri leur art durant l’année qui sépare le premier album du suivant. Pourquoi ne pas imaginer de longues heures à écouter Cassie et Ryan Leslie, les Beatles, Michael Jackson, Lil Wayne ou Gucci Mane par exemple ? Il se peut même que les deux frères soient allés se perdre si loin dans leur labyrinthe qu’ils aient eu accès à des pièces jusqu’alors inconnues.
Le résultat, SremmLife 2, est un Flockaveli avec des pistolets en plastique, qui rend caduque les comparaisons balourdes à Kriss Kross et Milli Vanilli. Un falsetto céleste sur « Swang », en lévitation totale au refrain de « Look Alive » ou en transmigration ralentie sur la production TGV de « Black Beatles », Swae Lee est devenu à lui seule une discothèque de gimmicks pop, infinis et aussi efficaces que raffinés. Slim Jxmmi apporte l’équilibre parfait, en amenant l’énergie coup de poing et les images farfelues. Les Rae Sremmurd font désormais leur rap pop avec une minutie moléculaire, comme pour prouver que cela peut être une musique d’orfèvre.
Leur énergie, toujours fraiche et juvénile, est contenue par la noirceur des productions, beaucoup plus sombres que sur l’album précédent, comme si leur fête s’était poursuivie dans la nuit, avec tout ce que cela implique : les corps amorphes, les trous noirs et les descentes plus ou moins bien vécues.
Sur « Shake It Fast » et « Set The Roof », ils revendiquent leur filiation en rendant hommage à tout le rap festif, de 2 Live Crew à DJ Mustard en passant par Three 6 Mafia et Lil Jon & The Eastside Boyz. Mais la deuxième moitié du disque les ancres on ne peut plus dans l’époque, celle de la génération Spring Breaker pour qui la fête est avant tout une fuite. Avec les méditations de « Came a Long Way », « Now That I Know » et « Take It Or Leave It », ils explorent de nouveaux thèmes et démontrent au passage qu’ils sont plus polyvalents que ne veulent le croire leurs détracteurs.
Cette fois, le public différencie les deux frères, et remarque particulièrement l’éclosion du plus jeune des deux.
Swae Lee écrit comme Mike Will compose. Grâce à l’utilisation des filtres passe-bas, atténuant les aigus pour ne laisser passer que les basses fréquences, Mike Will manipule le son comme une matière organique. En les plongeant dans ces filtres, il sépare ses pistes pour qu’elles soient audibles une à une, puis les fait remonter à la surface pour un climax où les éléments convergent. Swae Lee s’amuse à suivre ces constructions avec sa voix, crée des montées, des explosions progressives, part en voix de tête jusqu’à l’évanouissement avant de se réveiller en voix basse. Derrière, Jxmmi envoie tout voler en éclat avec ses couplets dynamites, nous ramène dans le surréalisme d’Atlanta, décrit avec des images de dessins animés. Leurs personnalités dégoulinent désormais de partout dans leur musique.
Le 4 aout 2017, sort « Perplexing Pegasus », premier extrait d’un prochain album. À force d’excursions dans l’histoire de la musique, les frères Brown ont dompté Pégase, cheval doté des ailes de l’imagination et symbole de l’inspiration poétique.
Il est indéniable que Swae Lee a une influence notable sur le rap depuis 2015. Peu de temps après la sortie du premier SremmLife, la chanson « Antidote » de Travis Scott agace terriblement Mike Will qui, comme tout le monde, reconnaît le style de son protégé. « Il va falloir commencer à préciser ‘inspiré par Swae Lee’ dans le titre de vos chansons… », dit-il. Les ad-libs et les mélodies du cadet des Brown se diffusent et s’exportent de plus en plus, y compris en France.
Plutôt que de laisser ses idées être utilisées par d’autres, Swae Lee prend Pégase par les cornes. En 2016, il écrit « Formation » pour Beyoncé, single événement nominé aux Grammy Awards. On y reconnaît la construction mélodique ascensionnelle de Lee, ainsi que les jeux de gorges du regretté Bankroll Fresh, typiques du rap d’Atlanta actuellement. Quelques mois plus tard, grâce à « Unforgettable » co-écrit pour French Montana, Swae Lee obtient son premier podium au Billboard, confirme son talent d’auteur, et trouve peut-être la voie à suivre pour s’envoler encore plus haut.
Aussi inventifs, influents et réussis que peuvent être les premiers albums de Rae Sremmurd, le duo n’a pas le statut des Drake, Future et autres Travis Scott. Peut-être qu’après des années à arpenter les sous-sols de leur discothèque, il est temps pour eux d’étudier le monde extérieur.
Les productions de SR3MM noircissent encore d’avantage la musique de Rae Sremmurd. Des mélodies acides, des fréquences désaccordées et des petites dissonances créent une aura étrange. Les deux frères rappent sur des boites à musique disloquées et des bruits de bornes d’arcade en panne. L’ombre électroniques et atmosphérique qui plane sur ce nouvel album est un peu celle de « Black Beatles », c’est aussi celle de The Weeknd.
SR3MM est enregistré en parallèle de la tournée américaine de Weeknd, pour qui Swae Lee et Jxmmi assurent les premières parties. L’influence du robot canadien se ressent dans ces sonorités froides et nocturnes, comme dans leur nouvelle manière d’écrire leurs peines et leurs relations amoureuse. Sur « Bedtime Stories », on différencie mal la voix de Weeknd de celle de Swae Lee, chantant tous les deux que l’amour est un horrible cauchemar.
La release party du disque à Los Angeles à lieu dans un décor post apocalyptique, plongé dans le brouillard et éclairé de néons verts cachés au fond des piscines. Une esthétique mélangeant gothique et cyber punk, qui prolonge l’obscurcissement de leur musique. Dans la vidéo nocturne de « CLOSE », les deux frères apparaissent même en vampires suceurs d’amour. Les Rae Sremmurd sentent qu’il est bon de s’assombrir et d’avoir l’air émotionnellement torturé pour se faire une place dans la pop moderne. Encore une idée plantée dans les crânes par ce diable de Weeknd.
Avant de préparer cet album, Mike Will fait écouter Speakerboxxx/The Love Below à ses artistes. OutKast splittait sur ce diptyque, pour que Big Boi et André puissent chacun explorer leurs particularités artistiques. L’idée est d’amener Rae Sremmurd à faire de même et d’avoir des solos aux tonalités distinctes, comme si les deux frères s’étaient séparés pour explorer des mondes différents.
Pour Swaecation, l’album solo de Swae Lee qui fait suite à SR3MM et qui précède Jxmtro, tous trois sortis en même temps le 4 mai dernier, la moitié de Rae Sremmurd ne veut plus être un rappeur qui chante mais simplement un chanteur. La production chauffée au soleil de « Guatemala » dégage des vapeurs de monoï. « Unforgettable » est son modèle, et par extension les productions de Jaegen, pourtant absent de l’album, ce beatmaker qui fait swinguer le r&b en y injectant des doses de musiques caribéennes ou africaines.
Sur les synthétiseurs de « Touchscreen Navigation », « Lost Angels » ou « What’s In Your Heart », l’album devient compagnon du HNDRXX de Future (qui lui aussi s’était laissé séduire par Abel Tesfaye) mais avec des cocktails de fruits en lieu et place des cachets de Vicodin. À côté de ces prédateurs tourmentés, Swae Lee dégage la délicatesse d’un bébé crooner. Ses ballades sont fraiches et efficaces, même si c’est au détriment de la magie que l’on découvrait dans ses prestations stellaires de l’album précédent.
Swae Lee trouve son énergie romantique dans une douceur asexuée, et bien éloignée de Tupelo ou d’Atlanta. Même lors de son trip « Offshore » avec Young Thug, l’inspiration est toujours trouvée dans un ailleurs fantasmé, à l’étranger, en mer ou sur les côtes d’une Californie de carte postale.
« Brxnks Truck » et « Chanel », les deux singles de Jxmtro – le solo de Slim Jxmmi –, prolongent l’esthétique et le son électronique bizarre de SR3MM. Sur le reste de son album, Slim Jxmmi surprend son monde en alliant ses habituels coups de folie à des fulgurances introspectives. Des confessions surréalistes à la Lil Wayne, sur des productions hétérogènes qui lorgnent vers Pretty Girls Like Trap Music de 2 Chainz. Avec ses guitares country trap tunes, « Changed Up » nous rappelle à la fois que les frères sont originaires du Mississippi, et que Slim Jxmmi reste l’ainé des deux.
Posant en tenue streetwear sur fond rouge orangé, Slim pourrait faire un clin d’œil à Organized Bass de Kilo Ali avec la pochette de son album. Il reste en tout cas un digne héritier des party boys de la bass music, tout en poursuivant son exploration du rap local, grâce aux orgues de Zaytoven ou à quelques compositions dada. Replongé dans l’Atlanta le plus cartoon qui soit, il n’est pas étonnant de le voir comparer ses bracelets à des mammifères marins, de découvrir que Zoë Kravitz est son double féminin, ou de l’entendre faire l’amour à des billets de banque avant de déclamer ses sentiments pour son entourage.
Big Boi et André ont cultivé des personnages et univers différents, jusqu’à parfaire une dualité qui se sublime lorsqu’ils sont ensemble. Big Boi, le campagnard ancré dans le réel, André, le poète mystique un brin lunaire. La force d’OutKast se trouve dans l’équilibre parfait trouvé entre ces deux personnalités différentes. Cette alchimie, ils aimaient l’appeler « The Cool Balance ».
Swae Lee et Slim Jxmmi ont cultivé des personnages et univers différents, jusqu’à parfaire une dualité qui se sublime lorsque qu’ils sont ensemble. Swae Lee la sucrerie romantique, Slim Jxmmi le fêtard sincère et loyal. Les Rae Sremmurd ne sont définitivement pas les nouveaux OutKast, mais comme eux, leur force se trouve dans l’équilibre parfait trouvé entre ces personnalités différentes. Et que SR3MM soit le plus réussi des trois albums en est la preuve.
Swae Lee, que l’on soupçonne pourtant d’être celui des deux qui a le plus envie de poursuivre en solo, a pleinement conscience de l’importance de cette alchimie. Deux jours après la sortie de leur triple album, il résume toute leur démarche en tweetant une mini bande dessinée inspirée de Dragon Ball Z. Dans la première case, lui-même en Son Goten, avec Swaecation dans la main droite. Dans la deuxième, son frère en Trunks, avec Jxmtro dans la main gauche. Dans la troisième et dernière case, les deux frères et leurs albums solos fusionnent pour former SR3MM et, enfin, devenir cette entité supérieure à la somme de ses parties : Rae Sremmurd.