Pièce par Pièce : Mickael Kidumu

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Petit à petit, de haut en bas, Pièce par Pièce. C’est de cette façon qu’un(e) styliste construit un outfit, dans une démarche artistique qui lui est propre. Au cœur d’une capitale qui regorge de ces architectes de mode, nous sommes allés à la rencontre de ceux pour qui l’habit fait le moine. Aujourd’hui, focus sur Mickael Kidumu.

Photos : @alextrescool

Après avoir découvert Risco Runner, nous rencontrons aujourd’hui Mickael Kidumu, un jeune styliste qui travaille dans l’ombre et préfère mettre en avant ses looks et ses muses (ici @atassel), plutôt que sa personne.

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Blazer : Vivetta, robe : Anaïs Jourden, chaussures : Martin Margiela, accessoires : Djula

Qui es-tu ?

Je suis Mickael Kidumu, styliste photo et rédacteur de mode. J’ai commencé les shootings éditoriaux entre 2013 et 2014 et travaille particulièrement pour des magazines de mode en France et à l’International, ainsi que pour des campagnes publicitaires, des lookbooks ou encore pour des célébrités.

Qu’est-ce qui a éveillé ton intérêt pour la mode ? 

Beaucoup de choses ont éveillé mon intérêt pour la mode, mais on peut dire que tout cela m’est venu naturellement. Au commencement, il y a ma famille : dans sa jeunesse, mon père était couturier et aimait énormément les vêtements. J’ai connu les grands couturiers comme Yohji Yamamoto ou encore Jean Paul Gaultier grâce à mes parents, étant gosse. Après ça, mon grand frère a pris le relais : il a commencé la peinture, dessinait des croquis de mode et s’intéressait à cet univers et j’ai fini par tomber dedans à mon tour. J’ai commencé à m’intéresser à la mode à partir du collège durant ma troisième ou quatrième année, après notre sortie scolaire dans les bureaux de LVMH ainsi que dans la grande boutique Louis Vuitton aux Champs Elysées. C’est là qu’on a pu découvrir en exclusivité la dernière collection Louis Vuitton, à l’époque.

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Blazer : Vivetta, robe : Anaïs Jourden, chaussures : Martin Margiela, accessoires : Djula

D’autres choses avaient également attiré mon attention comme l’esthétique, le set design, les photos des campagnes, les archives ainsi que les équipes derrière chaque projet. En entrant au lycée, je savais déjà ce que je voulais faire, mais je ne savais pas par où commencer. En parallèle de mes études, je commençais à faire des stages, c’était un bon moyen de se faire des contacts et de rencontrer de nouvelles personnes. Après avoir obtenu mon Bac et par la suite mon diplôme de mode, je me suis totalement donné au stylisme. Le reste de l’histoire est en train de s’écrire…

Est-ce que tu peux nous décrire ton style ? 

Si je dois décrire mon style en quatre mots – pourquoi quatre ? Je ne sais pas, sûrement parce que c’est mon chiffre préféré. Ce serait : nonchalant, versatile, sans effort, évolution. Mon style est le produit de mon environnement, mais d’une manière améliorée. Quand je jette mon dévolu sur quelque chose, je le porte dans le but de lui donner du sens même si les autres ne le trouvent pas spécialement intéressant ou pas assez dans l’actualité. Mes proches ont tendance à me dire : « Même en jogging et sweat à capuche tu rentres n’importe où comme si c’était une tenue passe-partout. » Ça me fait penser à la série Mr. Robot et le personnage Elliot Alderson : il va au travail en t-shirt, sweat à capuche, jeans et sneakers dans une entreprise où tout le monde est en suit & tie. C’est assez insolite, car sa personnalité matche parfaitement avec sa tenue, j’aimerais bien tenter l’expérience pour confirmer les dires de mes homies. [rires]

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Blazer : Vivetta, robe : Anaïs Jourden, chaussures : Martin Margiela, accessoires : Djula

Quelles sont tes inspirations ?

Je dirais l’environnement, l’humain, l’attitude, le comportement, le mode de vie, les villes que je visite, mais aussi et surtout, la jeunesse et sa diversité. Cela peut se voir ou se faire ressentir à chaque shooting ou autres projets sur lesquels je travaille… Il y a toujours ma petite touche. Puis j’aimerais également ajouter la musique et la nuit. La nuit parce que ce n’est pas juste un temps, c’est aussi un endroit, un lieu dans lequel tu peux vraiment te retrouver avec toi-même, car tout paraît différent… Les choses peuvent aller doucement et puis s’accélérer d’un coup. C’est dans ce genre de moment que mon processus de pensée prend de la couleur et me pousse à aller plus loin, du coup, je ne dors pas assez, car ce même processus me garde constamment éveillé et occupé.

De quel taf es-tu le plus fier pour le moment ? 

Je vais sûrement te donner une réponse connue de tous, et surtout de la part des artistes chanteurs, c’est toujours amusant quand ils te sortent ça… De quel taf suis-je le plus fier ? Obligatoirement du dernier en date ou encore mieux, mon meilleur projet sera le prochain qui sortira et pour ça, faut rester in touch. « Qui m’aime me like et me follow« , comme dirait notre Dems national.

Quel serait ton dream job et avec qui aimerais-tu travailler ? 

Bonne question, déjà je ne vais pas te parler des noms qui ressortent souvent, car bien évidemment on veut tous bosser avec ces personnes-là. Je dirais sans hésiter 21 Savage, Wizkid, PNL, BØRNS, Morgane Saint, Teyana Taylor, Tom Odell ou encore Jared Leto. Et j’aurais aimé travailler avec Aaliyah, Michael Jackson, Tupac, Rick James, Prince, Mac Miller, David Bowie et Jahseh Onfroy. Bosser dans le secteur de la mode et réussir à vivre de cette passion, c’est déjà un peu vivre son dream job et qui ne rêverait pas d’être son propre patron ? Ce n’est pas génial de ne pas avoir de patron ? Pouvoir gérer mes horaires et travailler quand je veux, même si en vérité je travaille tout le temps [rires].

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Blazer : Vivetta, robe : Anaïs Jourden, chaussures : Martin Margiela, accessoires : Djula

Il n’y a pas vraiment de place pour une journée de congé, mais bon… Comment peux-tu te plaindre quand tu fais ce que tu veux et dans l’industrie que tu aimes ? Mais si je devais me fixer un but, ce serait évidemment de faire ce que je fais dans une grande ville, où les gens sont à la pointe de la mode, ou du moins, s’y intéressent tout particulièrement. Par exemple, New York, LA, Milan, Berlin ou Tokyo. Ces villes sont très axées sur la mode et offrent beaucoup d’opportunités, ce sont de bons endroits pour exercer ce métier.

Qu’est ce que tu aimes le plus dans ton métier de styliste ? 

C’est un métier qui est tout sauf ennuyeux. Je suis rarement au même endroit, dans la plupart des cas je suis soit chez moi, soit en showroom ou en rendez-vous. Le processus et le rythme de travail avant et après un shooting sont aussi fatigants qu’excitants… La préparation est plus compliquée que le travail en lui-même sur le set. En plus de réaliser plusieurs tâches dans la journée, mon appartement devient rapidement un dépôt pour vêtements de toute beauté, mais le moment que j’apprécie le plus c’est quand je commence à créer les looks, je m’inspire de tout et tout peut m’inspirer sur le moment.

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Blazer : Vivetta, robe : Anaïs Jourden, chaussures : Martin Margiela, accessoires : Djula

Le but est vraiment de briser les limites stylistiquement parlant surtout avec, en arrière-plan, de la grosse trap musique ou même de la musique un peu plus nostalgique du style Gwen Stefani, Empire of The Sun ou Depeche Mode quand je pète vraiment la forme et que je rentre dans ma folie [rires]. 

La pièce de ta garde-robe dont tu ne te sépareras jamais ? 

Toutes mes pièces marquées S.P. BADU, c’est pour me rappeler que le travail paye toujours.

Qu’est-ce qui t’énerve le plus dans la mode ? 

La mode est un milieu génial, mais énervant et détestable à la fois, je trouve qu’il y a pas mal d’ignorance… Quand je vois les dérapages des grandes enseignes sur des sujets sensibles, je me demande vraiment si avant d’officialiser et commercialiser un produit, les membres du studio ne réfléchissent pas à une ou deux fois avant de confirmer ce même produit. Par la suite, quand l’erreur est déjà faite, ils font un communiqué pour s’excuser… Mais pourquoi ne pas simplement éviter cette maladresse dès le départ ?

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Blazer : Vivetta, robe : Anaïs Jourden, chaussures : Martin Margiela, accessoires : Djula

Dans le secteur de la mode et dans l’art il y a aussi cette envie de catégoriser les personnes par rapport à leur âge, leur couleur ou autre… C’est très fatigant quand vous arrivez avec un projet ambitieux ou des idées géniales, mais qu’elles sont mises au second plan. Beaucoup ne mentionnent tout simplement pas leur âge, car si tu le mentionnes, c’est comme si tu te mettais une épingle dans ton savoir-faire, ton intelligence et ta maturité. Pour moi, le savoir-faire, l’intelligence et tout ce qui va avec s’acquiert avec l’expérience et le chemin parcouru, c’est tout ce qui doit compter !

Quelle est ta vision du style de 2019 ?

Toujours plus de couleurs. D’ailleurs, je pense que les couleurs tendance vont être l’orange, le beige, le vert et le violet. Le look monochrome a encore quelques beaux jours devant lui ainsi que le total look imprimé qui s’invite sur toutes nos pièces préférées. Il y a aussi le retour du tailoring façon années 90, slim et ajusté, ou le layering avec un costume. Au niveau des accessoires, les mini sacs et le transparent vont vivre leurs meilleurs jours, mais j’espère qu’on verra beaucoup plus de looks western avec du cuir, des santiags et des accessoires osés.

Quel styliste aimerais-tu challenger ? 

Sans aucun doute mon co-worker Brian Placide. J’adore travailler avec Brian, on s’entend super bien, mais en même temps, on est tous les deux différents… Nous avons une approche qui se distingue légèrement dans le stylisme, nous parvenons à créer des looks complètement différents laissant apparaître chacune de nos personnalités et c’est tant mieux, car il faut de tout pour remplir son compte en banque.

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