Kareem ‘Biggs’ Burke : « Kanye West voit ce que les autres ne voient pas »
Kareem « Biggs » Burke incarne ces légendes discrètes, celles qu’on ne voit que rarement mais que personne n’ignore. Dans le monde du rap, « Biggs » a fait la pluie et le beau temps : le cofondateur de Roc-a-Fella, avec Jay-Z et Damon Dash, était ce travailleur de l’ombre qui faisait en sorte que le moteur du Roc ne tousse jamais. Un machiniste dont le travail a permis à tous les artistes du mythique label new-yorkais de briller à la hauteur de leur talent. Entretien.
L’histoire du hip-hop, c’est celle de ces empires nés dans la rue. Parmi certains de ses plus grands hustlers-entrepreneurs, Kareem « Biggs » Burke s’est illustré dès le milieu des années 90 avec trois mots qui résonnent toujours aujourd’hui : Roc-a-Fella. Le label, fondé en 1995 aux côtés de Shawn « Jay-Z » Carter et Damon Dash, est intrinsèquement lié au mode de vie de « Biggs ». Débrouille, audace et action : il est une des véritables incarnations de l’état d’esprit « street smart » qui l’habite depuis sa plus tendre enfance. Cette mentalité, on la retrouve dès les premiers mots du premier titre du premier album de Jay-Z sur « Can’t Knock The Hustle ». Plus de 20 ans plus tard, les trois fondateurs ont eu raison de ne pas se laisser abattre et croire en leurs chances de le faire à leur façon. Qui d’autre aurait cru qu’un jour les records de Jay regarderaient de haut ceux d’Elvis Presley, et que ces grandes maisons de disques finiraient par avoir besoin de Jay, Damon et Biggs et non l’inverse ? En magicien d’Oz derrière le rideau, « Biggs » a eu du flair avant tout le monde sur Jay-Z, Cam’Ron ou Kanye West. Et pas seulement le flair de ceux qui repèrent les futurs artistes à succès, le flair de ceux qui savent transformer la poussière en or. Des ruelles sordides de Brooklyn à son bureau au dernier étage d’un gratte ciel du Midtown new-yorkais, l’homme aura permis d’insuffler une vision empruntée aux drug dealers de sa ville : le « supply & demand ».
Musique, business et mode, le New Yorkais a su marquer de son empreinte l’identité entrepreneuriale des acteurs du hip-hop. Un esprit qui ne l’a jamais vraiment quitté : condamné récemment à de la prison, il n’en ressort pas abattu mais inspiré, et décide de lancer NCS (New Canaan Society), encourageant les hommes noirs à entretenir de meilleures relations dans les prisons. C’était en Air Force 1 qu’il marchait en direction de son succès, aujourd’hui, la paire blanche comme l’état d’esprit Roc perdurent et demeurent pertinents et influents – Nike a d’ailleurs réédité dernièrement une paire d’Air Force 1 Roc-a-Fella avec Biggs, tout un symbole. Après tout, ces quelques mots dans le remix de « Diamonds From Sierra Leone » de Jay-Z avaient déjà tout résumé : « I’m not a businessman, I’m a business, man. »
Réalisation vidéo : Samir Bouadla, Célestin Soum
Texte : Shkyd