Rémy : « Je sais que c’est soit le rap, soit rien »
Signant son premier morceau sur Banger 3 de Mac Tyer, le jeune Rémy d’Aubervilliers annonce rapidement la couleur : la mélancolie. Les productions ont beau être actuelles, ses textes prennent le contre-pied. Il le dit lui-même, il est venu « refaire du rap français », ce rap émotif, porté d’un message, apolitique de fond, scolaire de forme. Il sort son premier album le 23 mars, C’est Rémy, un dix-sept titres sublimé de nostalgie. Interview avec l’héritier du rap d’Auber’.
Photos : @samirlebabtou
Etonnant. C’est sans doute le premier mot qui vient à l’esprit à la découverte de Rémy. Etonnant pour les thèmes empruntés, étonnant parce qu’il réussi à les calquer sur des productions contemporaines. Etonnant pour la volonté de remettre au goût la nostalgie, les violons, les boucles de piano. Rémy c’est ce « rappeur-journaliste », posté sur le rebord d’une fenêtre avec une paire de jumelles, observant son environnement et les gens qui y évoluent. À l’intérieur de cette bulle, il agit comme un écrivain compulsif : des notes sur un carnet, il écrit les sous-titres de la vie de quartier, « comme à l’ancienne« .
L’histoire commence à l’entrée d’un gymnase en plein Aubervilliers, il freestylait pour ses potes, encore discret. L’un d’eux a vendu la mèche à un ‘grand’ du quartier, pas n’importe lequel : Socrate, Mac Tyer pour les intimes. Il n’a suffit que d’une invitation en studio pour qu’El General se rende compte du potentiel du jeune adolescent. Il l’emmène signer à Def Jam, participe à l’élaboration du style Rémy, l’épaule, l’aide, apprend autant qu’il enseigne. Finalement, la magie opère quelque temps après au planète rap d’Hornet la Frappe. Alors que Rémy arrivait « pour tout niquer« , Mac Tyer lui conseille de faire « Réminem » et pendant trois minutes, le studio est comme coincé dans une boucle temporelle. Il fallait trouver les mots, alors Sadek, également présent, en profite pour détendre l’atmosphère avec honnêteté : « Tu vas me faire rer-pleu Rémy arrête. Arrête de rapper notre vécu comme ça je suis sensible je vais rer-pleu. » Tout est dit. Et si l’on avait le malheur de penser que la magie n’opérait que sur un seul morceau, C’est Rémy est là pour étirer la boucle temporelle a dix-sept titres. Une heure durant laquelle la musique devient un film, celui de l’auteur, de son quartier, de ses troubles, ses remords, ses regrets, ses ambitions, ses déboires… Tant d’autres. La bande-son véritable d’une vie humaine.